[Spécial RSE] Anjou Boissons s’essaie au réemploi du « verre perdu »

Olivier Bitoun
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Un camion au second plan avec des caisses plastiques contenant des bouteilles au premier plan

Le distributeur Anjou Boissons souhaitait donner une autre destination que le recyclage à la quantité de bouteilles en verre qui échappent à la consigne dans les CHR. Il teste avec la société Eco in Pack un circuit de réemploi des contenants collectés chez ses clients. 
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Chez Anjou Boissons, à Angers, la troisième collecte de « verre perdu » est en cours. Les deux premières, à l’automne et en fin d’année 2023, ont permis à Eco in Pack, un spécialiste du réemploi, de ramasser 1,5 tonne de verre soit environ 3000 cols. Il ne s’agit encore que d’un test à petite échelle, mais le partenariat a du potentiel. Sarthe & Anjou Boissons, la maison mère du distributeur angevin, un adhérent Distriboissons, possède en effet un second site à La Flèche et collecte une centaine de tonnes de «verre perdu» chaque année auprès de ses clients CHR. Et chez son associé, le groupe Ouest Boissons (23e de notre Top 100), qui garde un œil attentif sur le test, le tonnage est 10 fois supérieur ! « On sent un réel élan en faveur du réemploi dans la filière boissons actuellement et nous étions à la recherche d’un dispositif nous permettant de réutiliser nos contenants », explique Damien Gault, le directeur général de Sarthe & Anjou Boissons. Le réemploi du verre serait, en effet, plus vertueux que le recyclage sur le plan environnemental, lequel consommerait 76 % d’énergie en plus et 1/3 d’eau en plus, d’après l’Ademe.

Un modèle économique à trouver
La rencontre entre Anjou Boissons et Eco in Pack s’est faite grâce au fabricant de liqueurs et sirops Giffard, déjà adepte du réemploi. Fondée en octobre 2021 par Pierre-Olivier Bouvry et Martin Calmettes, deux ingénieurs spécialisés en packaging ayant passé vingt ans dans les spiritueux pour l’un et dans les parfums pour l’autre, la start-up récupère chez Anjou Boissons les bacs de contenants « perdus » pour les acheminer vers un Établissement ou service d’aide par le travail (Esat) d’Angers. Là, ils sont triés par types et qualité. C’est la première étape de la boucle du circuit court. « Les 2/3 des bouteilles récupérées chez Anjou Boissons sont propres au réemploi », se félicite Martin Calmettes; le tiers écarté est envoyé au recyclage. Les bouteilles conservées sont alors lavées à 75 degrés avant d’intégrer le stock d’Eco in Pack qui en compte 300 000 réparties sur une trentaine de références (vins, spiritueux, sirops et jus), selon son dirigeant. Viticulteurs et industriels des boissons n’ont plus qu’à passer commande sur le site d’Eco in Pack. « On trouve assez facilement des acheteurs de bouteilles vides. Tout l’enjeu est de leur proposer des produits au même prix que le verre neuf, malgré le coût de la collecte, du tri, du lavage et de la redistribution », explique Martin Calmettes ; le point de bascule se situerait autour de 35 cts l’unité.

Régionaliser et mutualiser les outils
Pour y parvenir : « Il faut régionaliser et mutualiser les outils (logistique, lavage) », répond Martin Calmettes. Un constat qui l’a conduit à implanter les deux premières stations d’Eco in Pack dédiées au lavage des bouteilles (la seconde ouvrira en septembre 2024) à Cognac, dans un fief français de la production de spiritueux et à 125 km, seulement, de Bordeaux. Le souci de mutualiser les flux logistiques est également à l’origine du partenariat entre J.Milliet et « La Consigne pour Réemploi » (voir encadré). « Le réemploi comme la consigne sont vertueux quand ils s’inscrivent dans un circuit court », confirme Camille Delettrez, directrice marketing et communication du réseau de distributeurs de boissons C10. Et si son réseau étudie les offres de reremplissage de bouteilles de vin non prévues pour cela à l’origine, (C10 a collecté plus de 13 500 tonnes de « verre perdu » depuis 2015, ndlr) elle regrette les points faibles des acteurs existants. « Les dispositifs actuels manquent encore de densité au niveau de leurs stations de lavage. S’il faut qu’un camion parcoure 800 km avant que les bouteilles soient lavées, il faut s’interroger », pointe-t-elle. La question est autant économique qu’écologique !

Opération - J.Milliet logisticien de « La Consigne pour Réemploi » en Ile-de-France 
Le distributeur CHR francilien a été choisi par Petrel, la société qui coordonne l’opération « La Consigne pour Réemploi », pour collecter et trier les bouteilles vides, consignées, dans les 14 points de vente de la grande distribution participants en Ile-de-France (9 Système U et 5 Leclerc). Démarrée en février, l’opération porte sur 14 références (verre et PET) des marques Coca-Cola, Eckes Granini, Nestlé Waters, Lorina et Meteor. Les consommateurs rapportent leurs bouteilles vides dans des machines situées à l’entrée des magasins et récupèrent en échange un bon d’achat de 0,10 €, à valoir dans le magasin, pour chaque bouteille de 33 cl et de 0,20 € pour celles de 75 cl et de 1 litre. J.Milliet récupère les bacs - avec 60 à 70 bouteilles à l’intérieur - dans les machines, les ramène sur ses plateformes où il les trie avant de redistribuer les contenants vides à chacun des 5 industriels metteur en marché. Distributeur exclusivement CHR, J.Milliet voit dans cette opération l’opportunité de massifier ses flux retour. Ses camions effectuent déjà des tournées dans les départements franciliens où ils livrent des clients CHR et y collectent leurs bouteilles consignées ; les 14 magasins de la grande distribution sont donc juste des stops supplémentaires. Les contenants qui y sont récupérés s’ajoutent à ceux collectés dans les CHR. Même chose pour les flux retour vers les industriels des boissons. J.Milliet exploite déjà des circuits retour avec chacun des industriels - à l’exception de Lorina - alimentés par les bouteilles collectées auprès des CHR. Là encore, les contenants récupérés dans les hypermarchés et supermarchés s’ajoutent aux flux existants. Le choix, fait par Petrel, d’un distributeur CHR qui couvre déjà la zone, pour assurer la logistique de l’opération est logique. Car aucun circuit logistique dédié ne saurait être rentable !

Chiffres clés 
•15 Md de bouteilles en verre commercialisées en France chaque année dont 4,5 Md de bouteilles de vins et spiritueux (1). 
• 6% d’emballages réemployables à proposer en 2024 et 10% en 2027 pour chaque metteur en marché, selon la loi Agec. 
(1) Source: Eco in Pack d’après Réseau Consigne.

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Boites plastiques bleues contenant des bouteilles vides
Olivier Bitoun
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