[Spécial RSE] « Sur l’environnement, nous répondions surtout aux sollicitations. Désormais, nous souhaitons être à l’initiative »
Spécialiste en droit des affaires, Nathalie Fussler occupait jusqu’à présent la fonction de juriste Droit affaires économiques et fiscales au sein du pôle Economique et Fiscal de la Confédération des Grossistes de France (CGF). Elle a pris ses fonctions de directrice du pôle Environnement le 8 avril. Plusieurs dossiers l’attendent, à commencer par celui des emballages et de leurs deux nouvelles REP.
Notre édition Zepros Distributeurs RHD - Spécial RSE 2024 vient de paraître. Elle est consultable et téléchargeable gratuitement ici.
L’environnement a aujourd’hui une place totalement légitime et centrale dans les entreprises et du coup, il était donc logique de créer un pôle à part entière. La question environnementale irrigue toutes leurs décisions financières, d’investissements mais aussi le développement des produits, et bien sûr leur logistique. Avec un pôle unique à la CGF pour traiter des transports, de la logistique et de l’environnement, cela faisait beaucoup de dossiers à gérer pour le service de Christian Rose (directeur du pôle Transport et Logistique de la CGF, ndlr). En conséquence, sur l’environnement, nous répondions surtout aux sollicitations. Désormais, nous souhaitons être à l’initiative.
Ils resteront dans le pôle Transport et Logistique de Christian Rose car nous souhaitons accorder une attention particulière à ces thématiques qui sont essen- tielles aux grossistes. De toutes façons, mon pôle est transversal et l’idée est de travailler en relation constante avec Christian Rose. C’est valable également avec les autres services ! Avec le pôle des Affaires économiques et fiscales, avec le pôle Social qui travaille sur les sujets de conventions collectives, d’emploi et de formation... La loi Climat et Résilience a, par exemple, ajouté des thématiques environnementales dans les attributions des comités sociaux et économiques (CSE) des entreprises de plus de 50 salariés. Dans les mois à venir, à chaque fois que cela sera possible, j’essaierai de sensibiliser au sujet de l’environnement.
Mon rôle sera celui que nous avons tous ici : accompagner les fédérations et les entreprises. Cela commence par une veille constante sur les différents textes européens car les lois relatives à l’environnement sont principalement travaillées à Bruxelles. Accompagner les entreprises, signifie aussi produire à leur intention des outils pratiques avec, en tête, l’idée de leur simplifier au maximum les sujets par des présentations, des guides, des infographies ; la variété des formats favorisant l’assimilation. Là, j’ai décrit mes missions en direction des fédérations. Il y a aussi bien sûr l’autre versant qui consiste à les représenter. C’est le lobbying. Il s’agira pour moi de sensibiliser les parlementaires et les pouvoirs publics aux demandes et aux particularités des grossistes. Et même si mon rôle sera avant tout national, nous invitons, comme nous l’avons toujours fait, les entreprises à nous faire remonter leurs exemples de terrain car ils nous fournissent la matière très concrète dont nous avons besoin.
Nous en avions l’idée depuis un moment car depuis 2023 nous animons une formation sur la RSE au sein de la CGF, qui s’adresse aux entreprises. Nous souhaitions donc inviter nos fédérations, leurs délégués généraux et leurs équipes à un événement consacré à la RSE. Les deux événements coïncidants plutôt bien, nous nous sommes dit que ce serait aussi l’occasion de leur présenter le nouveau pôle Environnement ! Le 24 avril, l’objectif sera d’échanger avec les fédérations sur leurs attentes et leurs besoins, et aussi de les familiariser avec les nombreux sujets attachés à la RSE. Car toutes nos fédérations n’ont pas le même niveau de maturité. Si certaines emploient des permanents en charge de ce sujet et en ont une bonne connaissance, d’autres n’ont pas les mêmes moyens. Notre intention est de définir comment la CGF peut toutes les accompagner. Dans les premiers mois, mon rôle va consister à établir une feuille de route et à identifier les thématiques intéressant les différentes fédérations, en ayant toujours en tête la dimension confédérale de la CGF. Cela signifie que nous privilégierons les thématiques qui concernent le plus grand nombre et que nous laisserons aux fédérations le soin de traiter les sujets propres à leur secteur.
Je vais vous répondre de mon point de vue puisque l’objet du séminaire du 24 avril est précisément de confirmer ce que nous pressentons. Le premier sujet porte sur les emballages et il est commun à toutes les fédérations à des degrés divers. La France doit en effet remplir les objectifs européens en matière de réemploi des emballages et de recyclage des plastiques, des cartons et d’autres matériaux. S’agissant de la restauration, il y a bien évidemment une attention toute particulière au réemploi des contenants cette année. Rappelons que la filière REP (responsabilité élargie du producteur) « emballages de la restauration », en charge du recyclage des emballages, s’est constituée le 15 mars. C’est tout récent. Le second changement à venir dans le domaine des emballages concerne toutes les fédérations. En effet, une filière REP des EIC « emballages industriels et commerciaux » débutera le 1er janvier 2025. Jusqu’à présent chaque fédération et chaque profession de grossiste avait son circuit pour le traitement de ses emballages. Nous laissions à nos fédérations le soin d’organiser leur filière car elles sont les mieux placées et les plus expertes pour le faire. Désormais, la donne change. La REP des EIC va venir coiffer toutes les filières déjà constituées. Elle doit démarrer dans moins de neuf mois, il faut donc la préparer cette année... Nous en avons les premiers éléments. Une étude de préfiguration réalisée par des cabinets de conseil a été publiée récemment. C’est sur cette base que les futurs décrets et arrêtés qui dessineront le visage de cette nouvelle REP seront rédigés par le ministère. L’étude fait un état des lieux des emballages industriels et commerciaux existants, des acteurs de la filière, et de son organisation actuelle entre recyclage et réemploi. À partir de là, les auteurs ont formulé plusieurs hypothèses. Nous analysons le texte en ce moment à la CGF, au sein d’un GT dédié, car notre responsabilité va être de déter- miner la direction vers laquelle nous souhaitons que la filière s’oriente.
Cette REP va venir s’installer au cœur de systèmes déjà en fonctionnement où règne une grande diversité de matériaux et de professions. Son défi va être de ne pas déstabiliser ce qui existe et qui fonctionne bien, comme la collecte, le tri et le recyclage des cartons et, bien sûr, le circuit des palettes bois, mais de stimuler ce qui fonctionne peut-être moins bien comme le recyclage des plastiques, par exemple. À la CGF, nous veillerons aussi à ce que soit prise en compte la position particulière des grossistes en tant que distributeurs. Dans certains cas, ils sont les metteurs en marché de ces emballages industriels et commerciaux, et ils interviennent donc en amont de cette filière (de nombreux grossistes possèdent des marques propres) et, dans d’autres cas, ils effectuent simplement la collecte d’emballages mis sur le marché par leurs fournisseurs.
Les deux nouvelles REP sont des occasions de progrès pour les entreprises. Elles comportent quantité d’objectifs très concrets qui vont les obliger à réfléchir à la manière dont elles gèrent leurs emballages aujourd’hui. À se demander comment elles pourraient en faire une richesse, un gisement, quand aujourd’hui elles y voient davantage des déchets dont elles doivent se débarrasser. J’ajouterais que les entreprises doivent être également proactives. Leur respon- sabilité environnementale va bien au-delà de la question des REP. Elles doivent s’impliquer dans l’écoconception, pour celles qui développent des produits, et bien évidemment dans la conception de leurs emballages et des suremballages.
Absolument ! D’autant qu’il concerne toutes les fédérations. Désormais, une entreprise doit produire son rapport extrafinancier à côté de son rapport finan- cier annuel. Pour l’instant, seules les grandes entreprises sont soumises directement à cette obligation, mais indirectement cela implique aussi les plus pe- tites entreprises, qui sont leurs fournisseurs ou leurs clients, puisqu’elles vont être questionnées sur leurs pratiques. S’agissant de la forme de ce rapport RSE, là aussi les choses évoluent pour être unifiées au niveau européen. Jusqu’à présent, les reporting de durabilité étaient facultatifs et relativement libres dans leur forme. Maintenant, la directive européenne formalise tout cela.
PROJET
La CGF opposée à l’évolution du statut de chauffeur-livreur
« C’est un sujet qui n’est jamais remonté chez nous de la part des chauffeurs-livreurs », lançait Philippe Barbier, président de la Confédération des Grossistes de France (CGF), lors du déjeuner de presse qu’elle avait organisé le 21 mars. Manière de dire que l’intention des pouvoirs publics de revoir le statut des chauffeurs de poids lourds afin qu’ils n’aient plus à charger et décharger leur camion mais seulement à le conduire ne doit pas s’appliquer aux grossistes ! Il semblerait, en effet, que la revendication émane plutôt de chauffeurs employés par des entreprises de transport sur de longues distances.
Un rapport sur ce projet de réforme a été remis au gouvernement récemment. Le remaniement ministériel de ce début d’année, avec un changement de titulaire aux Transports, semble avoir replacé le dossier en dessous de la pile.
La CGF ne cesse néanmoins d’affirmer son opposition à ce projet. Son président défend la particularité du monde des distributeurs où les chauffeurs-livreurs de flottes en compte propre sont aussi des acteurs essentiels de la relation client pour les entreprises qui les emploient. « Charger et décharger son camion est un service intrinsèque au métier de chauffeur-livreur », indique-t-on à la CGF où l’on précise que ces opérations représentent 40 à 50 % de leur temps de travail.