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[Interview adhérent] Didier CLAUDE, Gautier SAS, Groupe ESTIVIN

Oana JAN
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Pour cette nouvelle interview adhérent, cap sur le Centre-Ouest ! Nous sommes allés (virtuellement) au coeur de la Corrèze, pour en savoir plus sur la réalité du métier de grossiste en région et son rôle essentiel pour le soutien de l'agriculture et la vie économique et sociale locale, et surtout pour la qualité et le goût des fruits et légumes frais.

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Un grand merci à Didier CLAUDE, Reponsable du site GAUTIER SAS à Brive la Gaillarde (Groupe ESTIVIN), qui a pris le temps de répondre à nos questions, de nous faire découvrir son quotidien et ses engagements pour les agriculteurs, les consommateurs et l'environnement.

Vous travaillez depuis longtemps au sein du groupe Estivin, qui prend très à cœur son ancrage local. Comment avez-vous construit cette relation avec les producteurs et vos clients ?

Je travaille chez Gautier Brive (Groupe Estivin) depuis 22 ans. J’ai été 10 ans Responsable commercial avant de devenir Directeur du site, et cela fait une quinzaine d’années que je m’investis dans la vie locale. Au départ, nous avons eu l’idée d’aller rendre visite aux producteurs, avec nos clients. Cela a beaucoup renforcé les liens entre eux et les agriculteurs. Quand nos clients disaient « c’est mon producteur », on savait qu’on avait réussi ! Quand le partenariat est fait, on est content.

Ensuite, les choses se sont faites naturellement. Une année, on avait beaucoup d’épinards, environ 150 kg, c’est une grosse quantité pour une collectivité. Notre client, la cuisine centrale de Panazol près de Limoges s’est organisée pour les utiliser dans sa cantine scolaire, et les enfants ont adoré. Ils ont dit à leurs parents que les épinards frais, c’était meilleur ! Nous avons donc renouvelé l’expérience l’année suivante avec les épinards à Panazol et avec les blettes avec la cuisine centrale de Brive…

Comment voyez-vous votre rôle auprès des agriculteurs ?

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Nous, grossistes, on peut accompagner les agriculteurs, pour leur donner des idées. On peut leur conseiller des légumes qui vont plaire aux restaurateurs. Comme ça, les agriculteurs n’ont plus peur de produire, et on a beaucoup de clients qui sont en demande de nouveaux fruits et légumes locaux. Avoir plus de variété dans les cultures, ça permet aussi aux agriculteurs de sécuriser la production, par exemple en cas de gel, comme cette année.

Petit à petit, les choses évoluent. Par exemple, nous avions un producteur de pommes, qui voulait diversifier sa production, et s’éloigner aussi des critiques sur les traitements, les pesticides… Nous avons décidé de l’accompagner. Il a choisi le kiwi, et 3-4 ans après, il a gagné au change, avec une hausse du chiffre d’affaires qui lui a permis de s’équiper en serres. Et comme le bouche à oreille va très vite, d’autres producteurs ont décidé d’en cultiver !

Le kiwi de Corrèze, qui est très bon, existe grâce à ça, et aux aides dont la filière a bénéficié. Tout le monde a joué le jeu, et cela a permis aux producteurs de développer une nouvelle culture qui demande à la base très peu de traitements, pour arriver au kiwi bio local, à des prix très corrects.

Bio, agriculture raisonnée, HVE3… la labellisation, c’est un travail de longue haleine.

Avant, le bio c’était de petites productions, qui ne permettaient pas aux agriculteurs d’en vivre, et qui coûtaient très cher. Maintenant, nous pouvons lier des partenariats avec les agriculteurs sur les pommes de terre, les courges, l’oignon, avec des prix corrects. Cela nous permet par exemple de servir les collectivités qui doivent répondre au cadre de la loi Egalim.

Par ailleurs, le bio c’est bien, mais nous, on soutient la culture raisonnée, par exemple pour la tomate, les pommes, d’autres légumes… On travaille avec les producteurs pour être labellisés HVE3 et rentrer dans la loi Egalim.

Nous avons un rôle de conseil auprès des agriculteurs, ça leur permet de prendre du recul sur ce qu’ils font. Avec Vivalya, on peut leur montrer comment ils sont mis en avant sur lavieadugout, par exemple. Ils voient que leurs efforts, leurs certifications sont valorisées auprès des clients.

Justement, comment faites-vous pour valoriser le travail des agriculteurs ?

Pour nous, c’est important de partir sur de bonnes bases avec les producteurs et les marchés, comme le marché de Rungis ou de Toulouse, pour faire les prix de façon à tirer les choses vers le haut. Il faut que tout le monde s’y retrouve, valoriser la qualité, réduire les pesticides, proposer des produits qui ont plus de goût, plus de diversité… C’est un travail sur la durée, mais il marche !

Même en GMS, aujourd’hui on se distingue grâce à ça. Avec les producteurs de tomates, nous avons travaillé pour qu’ils produisent moins, mais avec une meilleure qualité. On pousse aussi les producteurs à diversifier leurs cultures, on redécouvre des légumes oubliés, comme le panais. Et le fait d’obtenir des prix corrects pour nos agriculteurs nous permet de les soutenir dans cette démarche. On a pu constater qu’en Corrèze, traditionnellement terre d’élevage, de plus en plus d’entre eux se tournent vers le maraîchage, les fruits et légumes, ce qui est une évolution intéressante.

Pour y arriver, nous grossistes, on travaille avec les producteurs depuis longtemps, sur le terrain. C’est un métier de partenariat entre le producteur et le client. On prône toujours la production locale, et au fil du temps, on arrive à faire passer le message.

Gautier Primex, c’est du local avant tout !

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Le Groupe Estivin a 12 grossistes à service complet. Le siège, situé à Tours et actuellement dirigé par M. Bertin, appartient à Claudine Estivin, l’épouse de M. Estivin, et à ses filles, Anne-Emmanuelle et Mathilde, qui continuent à s’investir dans le développement de la production locale.

Sur Brive, Sarlat et Limoges, on a les mêmes gammes, mais aussi de la volaille, des BOF locaux, le canard, et même de la marée locale avec la truite de Dordogne. Cela représente 40% à 50% de notre chiffre d’affaires. Nous servons par exemple toute l’offre de légumes et fruits bio et locaux et de volaille de la Mairie de Limoges, ce qui fait travailler beaucoup de producteurs locaux.

On a également remporté avec Fornel, Pons et Sainfruit, qui sont aussi des adhérents de Vivalya, le marché du GARA de Nouvelle Aquitaine (groupement d’établissements publics de santé), où nous avons été retenus sur plusieurs lots.

Pour nous, le local est encore plus essentiel que le bio, et cela répond à une demande. Nos produits locaux, comme nos « Fraises de nos régions », cartonnent en distribution.

L’année 2020 a été compliquée, et le premier trimestre 2021 aussi.

Nous nous sommes pas mal débrouillés pendant la crise, on a su se réadapter par rapport à la perte de chiffre d’affaires liée à la baisse de la restauration.

Cette année, malgré le gel du printemps, nous allons également nous mobiliser pour que tout le monde s’en sorte. Quand nous avons une baisse de production, pour une raison ou une autre, nous valorisons nos produits en prix pour compenser la quantité. L’année passée, nous l’avons fait pour un producteur de pêches, qui avait un super produit malgré une quantité plus réduite. Cette année, les agriculteurs sont parmi les plus touchés par le gel, ce qui posera peut-être des contraintes sur les prix.

Comment faites-vous pour soutenir les agriculteurs, financièrement ?

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Dans certaines situations, nous pouvons faire des avances de paiement sur des équipements de culture, pour permettre aux agriculteurs de travailler.

Pour vous donner un autre exemple, avec Romain Clouet de Sodexo, nous avons lié un contrat tripartite avec un producteur de courgettes, qui nous a permis de convenir d’un volume sur lequel Sodexo peut s’engager. Nous avons d’autres contrats à venir, nous sommes pour que tout le monde s’engage pour soutenir la filière.

En ce qui concerne les collectivités, nous essayons de répondre à leur obligation de respecter les 20% de produits bio, tout en leur offrant un prix accessible. Il s’agit à chaque fois de trouver le juste prix pour l’agriculteur, mais aussi pour la collectivité.

Et pour l’environnement ?

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Le site de Brive a été le premier grossiste à être labellisé par l’ADEME dès 2012. Nous aimerions mettre en place la méthanisation, avec le soutien de la Mairie de Brive, et celui des producteurs aussi. On pourrait ainsi valoriser les productions qui ne le sont pas encore aujourd’hui.

Nous aimerions aussi aller plus loin dans la réduction du carton et du plastique. Avec les collectivités, nous allons mettre en place des consignes de caisses pour les salades pour l’année prochaine. Les clients sont en demande, et cela permet de limiter les coûts pour les producteurs. En restauration collective, nous pouvons le faire, et cela représente une demande spécifique dans certains appels d’offre.

Quelle est la place du grossiste aujourd’hui ?

Les producteurs ont passé un cap en 2020, ils ont réalisé que grossiste est un métier, parce que la logistique a un coût. Certains d’entre eux nous ont dit qu’ils aimeraient répondre à la plateforme Agrilocal, mais qu’il ne savent pas faire. Nous leur avons répondu qu’on pouvait le faire pour eux !

Récemment, la Chambre d’Agriculture de Corrèze nous a demandé de participer à la commercialisation des produits qui répondent à la charte « A table avec les produits origine Corrèze », pour approvisionner les cantines scolaires en produits locaux, qui bénéficient de subventions. C’est logique, en nous faisant travailler, on fait travailler les locaux !

Gautier Brive est aussi un acteur de la vie locale, sportive et autre. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Le sport est au cœur de la Corrèze ! Nous ne pouvions pas ne pas y participer.

Nous sommes présents auprès du CA Brive, le club de rugby de Brive, et aussi des « 10km de Brive », une course à pied qui se déroule fin mai, et dont nous sommes partenaires. Nous offrons des fruits à l’arrivée, et nous faisons appel aux agriculteurs pour les distribuer.

Pour finir, quel a été l’impact de la crise sur votre métier de grossiste ?

La crise a été l’occasion de mettre l’accent sur le local, et nous sommes le vecteur, le porteur d’initiatives sur ce sujet. Pendant le premier confinement, nous avions proposé des paniers de produits locaux, et nous en faisions même la nuit tellement nous avions de demandes !

Il y a un tournant qui va se faire : la consommation de viande décroît, et le grossiste doit faire comprendre aux producteurs qu’ils vont être bien rémunérés en diversifiant leurs productions avec les fruits et les légumes. La diversification marche, et ça leur permet de mieux vivre.

Mais dans la Corrèze, nous avons commencé ce travail il y a déjà longtemps, avec Jacques Chirac, et son fameux « Mangez des pommes », des pommes du Limousin bien sûr !

Oana JAN
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