« Je serai la représentante de chacun de nos professionnels »
À la veille du congrès et de l’AG du Groupement des Hôtelleries & Restaurations de France (GHR) qui se tiendront les 13 et 14 novembre à la Station F (Paris 13e), et qui doivent la porter à la présidence, Catherine Quérard, vice-présidente, a accordé un entretien exclusif à Zepros Resto au cours duquel elle évoque les dossiers prioritaires du syndicat et l’actualité du secteur.
A lire dans Zepros Resto 108 daté de Novembre 2023.
Rappelons que le GNI est né d’organisations professionnelles qui se sont regroupées et que le GHR est l’aboutissement à ce jour de ce travail de regroupement qui s’est poursuivi et accéléré avec la crise sanitaire. L’idée est de proposer une organisation forte, fédératrice, une organisation de référence, qui vit avec son temps et qui prend le lead du fait de son agilité, grâce au travail de construction et de rassemblement qui est
réalisé. En succédant à Didier Chenet, que j’admire et qui a révélé toute la puissance syndicale pendant les périodes noires du Covid que l’on a vécues, l’objectif est de poursuivre ce travail, c’est évident, mais, avant tout, d’être au service de nos adhérents. Leur apporter des solutions permanentes. C’est le cas, par exemple, en matière d’assurance avec GHR Assurance qui permet à nos professionnels d’être bien assurés en multirisque tout en ayant des prix très compétitifs.
Nous poursuivons ce travail en matière d’énergie, dont le coût a énormément augmenté. Il s’agit, ici, à la fois d’acheter de l’énergie la plus verte possible et dans les meilleures conditions tarifaires à l’heure actuelle tout en favorisant l’objectif de transition écologique pour nos professionnels. Bien sûr, on ne fait rien tout seul. Nous avons une superéquipe, très engagée en faveur de nos adhérents et de nos métiers. Dans la liste des 10 membres du bureau exécutif que j’ai proposé figurent 5 membres professionnels indépendants et 5 membres issus de groupes. Il y a, par exemple, Fabienne Ardouin, hôtelière parisienne, qui sera vice-présidente, et aussi Robert Guillet, P-DG de Buffalo Grill. Nous nous soucions toujours de l’équilibre dans tout ce que nous faisons.
Notre sujet majeur, c’est l’emploi. Des restaurants qui ferment faute de personnel, c’est une catastrophe. L’emploi, la formation, l’attractivité du secteur, les salaires sont pour moi des enjeux fondamentaux. Ce seront d’ailleurs les maîtres-mots de notre congrès des 13 et 14 novembre à la Station F à Paris. Tandis que Bruno Le Maire et Olivia Grégoire viendront parler d’économie, Olivier Dussopt parlera de l’emploi. Nous parlerons formation, de l’inclusion avec les POEC*, travailleurs étrangers, autoentrepreneurs…
Les autres priorités concernent le coût des matières premières, celui de l’énergie, et tous les sujets connexes afin de savoir comment demain nous faisons fonctionner nos établissements et nous gardons notre clientèle.
« L’idée est de proposer une organisation qui prend le lead du fait de son agilité. »
On s’y attendait, hélas ! Il est tentant tentant de dire qu’il s’agit des entreprises qui étaient déjà en difficulté avant la crise du Covid et qui ont réussi à se maintenir avec les aides. Personnellement, je pense que ce n’est pas la seule explication : aujourd’hui, il y a la problématique des coûts de production (matières premières et énergie, masse salariale…) et celle du remboursement des PGE qui produisent un effet ciseaux terrible sur les trésoreries alors que nous avons des marges qui sont réduites. Et lorsque l’on n’a plus de trésorerie, on perd les soutiens bancaires. On voit même des énergéticiens qui demandent des cautions pour pouvoir livrer de l’énergie à certains de nos adhérents. Il suffit de peu pour que ça passe ou que ça casse. À la sortie du Covid, nous avions déjà tous alerté l’État afin de demander de rallonger les durées de remboursement des PGE. Aujourd’hui, notre secteur d’activité est en grande fragilité.
Les professionnels du secteur CHR ont toujours dit qu’ils ne souhaitaient pas d’aides pour travailler, ils veulent juste travailler. On nous rappelle souvent que nous avons été aidés pendant le Covid… mais n’oublions pas que nos établissements ont été fermés pendant dix mois ! Quelle entreprise est capable de tenir dix mois sans indemnisation du fait de la fermeture qu’on lui impose ?
Nous sommes un secteur d’activité à forte intensité de main d’oeuvre et nous avons eu une progression salariale inédite. Au 1er octobre, la nouvelle grille des salaires, qui a été promulguée, se traduit par une augmentation globale de près de 25 % en deux ans dans certains niveaux de la grille. Je crois que nous sommes le premier secteur à avoir fait autant d’effort. Nous avons donc besoin d’avoir confiance dans l’État, dans sa capacité à favoriser l’emploi à travers nos activités, à travers la clarification de la situation des autoentrepreneurs. Soulignons aussi que nos métiers sont en tension. Il convient alors de permettre de régulariser certaines situations de travailleurs étrangers, sur des bases légales. Il faut faire feu de tout bois pour remettre le travail au coeur du sujet alors que nous pratiquons un des plus beaux métiers du monde : nous accueillons nos clients dans nos établissements pour qu’ils passent un bon moment, pour se détendre, se restaurer. C’est extraordinaire.
C’est effectivement un sujet important. Nous travaillons depuis plusieurs mois sur ce dossier, aux côtés des organisateurs et de l’État. Nous communiquons avec nos adhérents à travers des webinaires notamment. À nouveau ici, l’enjeu c’est l’emploi. Mais je ne suis pas sûre que les bonus-malus sur les contrats courts et la taxation des salaires soient une bonne chose pour permettre aux salariés de retourner vers l’emploi. Ce sera un travail de longue haleine mais pour autant, les JOP c’est demain. Il y a donc une urgence à attirer.
Cela devrait être de l’ordre de 60 000 postes dans l’hôtellerierestauration. Nous sommes en relation avec les bureaux d’étudiants, avec beaucoup d’associations. Les organisateurs travaillent également dans ce sens. Tout le monde relève les manches pour que la vitrine France soit la plus belle possible aux yeux du monde. Il s’agit de rester attractif au niveau du tourisme mondial, de donner une image ultrapositive de notre secteur d’activité et aussi de la France.
« Mes relations avec l’Umih et Thierry Marx sont très bonnes. »
Les discussions pour créer une « Maison commune » datent même d’avant. En effet, lorsque le regroupement des trois organisations fondatrices du GHR - SNRTC, SNRPO et GNI- s’est fait, il a été prévu dans les statuts la possibilité d’accueillir d’autres organisations. C’est même un objectif. Il s’agit, ici, de donner les éléments à toute organisation en rapport avec notre secteur d’activité d’avoir des statuts équilibrés, un fonctionnement clair et agile autour de valeurs très fortes. Nous avons ainsi su rapprocher à la fois les indépendants et les groupes de restauration ; donc, les conditions existent. Ensuite, c’est une question de maturité et de discussion. L’Umih a répondu à cette question l’an dernier lors de son congrès. Je ne suis pas pressée et la porte n’est pas fermée. Si demain il y a une Maison commune, c’est très bien, si cela ne se fait pas à court terme, ce sera ainsi.
Je veux d’abord me consacrer à fédérer ceux qui n’adhèrent à aucune organisation. Les convaincre de notre utilité, de l’importance d’être accompagnés, conseillés par des professionnels du secteur. Je veux leur donner l’envie d’aller vers une organisation professionnelle. Et évidemment… vers le GHR en priorité ! Car si les fondamentaux du GHR sont très anciens, son organisation est très moderne et agile.
Mes relations avec l’Umih et Thierry Marx sont très bonnes, d’abord parce que Thierry Marx est quelqu’un de grande valeur que je respecte. Nos organisations professionnelles reposent sur des enjeux majeurs et ces enjeux doivent converger. Il faut donc laisser du temps à la convergence. Le dialogue est complètement ouvert.
C’est un très gros dossier, qui nous occupe énormément depuis plus de deux ans, sur lequel le GHR a été très audacieux et n’a pas lâché. D’une part, s’opposer aux mastodontes que sont les émetteurs de titres-restaurants n’était pas facile ; d’autre part, nous n’avons rien à gagner en tant que syndicat : l’enjeu économique est pour nos adhérents et uniquement pour eux. Nous avons considéré qu’il y avait la nécessité d’un rééquilibrage entre les émetteurs, les restaurateurs et les utilisateurs.
Aujourd’hui, ce sont les restaurateurs et les commerçants qui acceptent les titres-restaurants qui paient la quasi-totalité des commissions. Ce n’est pas normal. L’Autorité de la concurrence nous donne pleinement raison sur ce point. De plus, le fait que l’Autorité de la concurrence déconseille le plafonnement des commissions est une très bonne nouvelle, car, pour nous, plafonner c’était maximiser. Or, nous voulons justement minorer.
Une solution, c’est la fin de l’exclusivité du remboursement des titres par son émetteur. C’est ce que dit l’Autorité de la concurrence : demain, on doit pouvoir envoyer tous les titres à un seul émetteur et que celui-ci rembourse l’ensemble des titres. Cela permet d’agréger des droits à remboursement par des intermédiaires et ouvre le marché de la négociation des commissions. Ce qui doit faire baisser le coût des commissions. Il faut désormais se rapprocher et discuter.
Le lancement de l’Observatoire, avec l’expertise de Food Service Vision, a permis de sanctuariser les chiffres, de les historiser et de les comparer. Nous pourrions le faire mensuellement mais cela demande des moyens. Un observatoire, cela coûte de l’argent et c’est lourd. Nous faisons très attention à l’argent de nos adhérents.
Mais comme nous sommes agiles et que nous collons à l’actualité, nous venons enrichir et compléter très régulièrement notre Observatoire au travers d’enquêtes auprès de nos adhérents. Ces enquêtes permettent d’agir, de réagir et aussi d’informer les institutionnels et le gouvernement sur des problématiques naissantes ou conjoncturelles.
Les enjeux concernent plusieurs transitions. L’emploi, bien sûr ; la transformation économique de nos entreprises, tout en gardant leur identité d’art de vivre à la française, et aussi leur adaptation à la transition environnementale. La question est de savoir comment on permet à nos entreprises de survivre à tous ces enjeux, à la fois économiquement et sociétalement. C’est pour cela que je me suis pleinement engagée, pour tous nos beaux métiers. Je serai la représentante de chacun de nos professionnels, quels que soient leur métier et leur implantation géographique, pour leur apporter des solutions.
*POEC : Préparation opérationnelle à l’emploi collective