Chloé Labiche

[SPECIAL INDEPENDANTS 2024] « Nous avons opéré un pivot stratégique en quittant Paris »

Jean Valfort
Dirigeant
Panorama Group
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Jean Valfort

Panorama Group élargit son horizon en mettant le cap au sud. Le groupe qui détenait plusieurs affaires parisiennes les a toutes cédées fin 2023 pour se concentrer sur Nice et des établissements de plus grande ampleur. Une stratégie payante comme le détaille Jean Valfort, fondateur et P-DG de Panorama Group, qui a doublé son chiffre d’affaires en deux ans.

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Comment se porte le groupe ?
Jean Valfort

Il se porte bien. Nous avons opéré un pivot stratégique en vendant toutes nos affaires parisiennes fin 2023 pour nous concentrer essentiellement sur la Côte d’Azur. Nous étions déjà présents depuis 2020 à Nice avec Bocca Nissa. Nous y avons continué nos investissements en achetant une plage, Bocca Mar, en 2023, et une grosse brasserie, le Félix, inaugurée fin novembre en plein centre-ville. À cela s’ajoute l’acquisition de deux affaires sur le Cours Saleya. Sans oublier notre restaurant Bocca Sunset ouvert en 2023 à Pornichet. En deux ans, nous avons doublé notre CA qui devrait atteindre les 25 M€ en 2025. Nous visons 50 M€ dans les cinq ans à venir.

Pourquoi cette décision de quitter la capitale ?
Jean Valfort

Nous avions quatre affaires à Paris. Il y a deux raisons à notre départ. Tout d’abord, nous avions des établissements de taille moyenne qui réalisaient entre 1 M€ et 1,5 M€ de CA par unité, dans le cadre de notre développement nous ambitionnons des affaires plus grosses entre 4 M€ et 6 M€ de CA. La deuxième raison est que la capitale est devenue très difficile à opérer, très sensible aux événements politiques et sociaux.

Quels sont les atouts de Nice ?
Jean Valfort

Outre le fait que je suis Niçois d’origine, la Côte d’Azur est un terrain de jeu formidable en matière d’hospitality. Nice a un aéroport international, trois cents jours de soleil par an, entre mer et montagne, difficile de faire mieux ! C’est une ville très dynamique avec un changement de génération et une professionnalisation du secteur. En 2023, nous avons réalisé les deux plus importantes acquisitions de Nice en restauration avec le Félix Faure et la plage de Bocca Mar. Nous y sommes parvenus grâce à mon ancrage local et mes relations mais la concurrence a été rude, nous faisions face à de grands groupes parisiens qui cherchent à s’implanter à tout prix.

Quel est l’ADN de Panorama Group ?
Jean Valfort

Nous n’avons pas un concept unique. Chaque établissement est singulier mais avec toujours des emplacements et des cadres impressionnants. Bocca Nissa est un rooftop en plein centre, Bocca Mar, une plage privée face à la Méditerranée… Nous proposons une cuisine de qualité, mais abordable. Au Félix, on peut déjeuner ou dîner entre 20 € et 30 €. Il y a également toujours de l’ambiance, de la musique live afin que les gens s’amusent et restent à table. C’est une dimension forte de la restauration aujourd’hui. Les gens ne cherchent pas seulement à se restaurer mais à vivre un moment.

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Panorama Group
Quelle est votre stratégie RH ?
Jean Valfort

Nous avons la chance d’avoir un ancrage local et une certaine réputation maintenant. Beaucoup de talents viennent à nous. Nous avons aussi une politique RH tournée vers les salariés : nous ne proposons que deux à trois coupures par semaine, nous avons acheté un immeuble dans la ville afin de loger les collaborateurs, notamment les saisonniers. Nous avons une politique de pourboires assez forte et travaillons avec des prestataires spécialisés dans l’incitation au pourboire. Le recrutement reste cependant difficile en cuisine où il y a une réelle compétence nécessaire. Sur la plage, nous pouvons servir jusqu’à 1000 couverts par jour, il faut une vraie puissance de feu.

Comment vous êtes-vous adaptés aux contraintes économiques ?
Jean Valfort

Principalement en quittant Paris et en optant pour des restaurants avec de plus gros volumes. Nous avons la chance d’avoir des adresses qui réa lisent de très beaux taux de marge. Nous n’avons rien changé en matière de qualité ni d’approvisionnement. Nous avons augmenté nos prix de 10 à 15 % seulement depuis la sortie du Covid et avons tout misé sur le remplissage des restaurants. Bocca Nissa fait ainsi 450 couverts par jour en été pour 180 places assises. Nous fixons des budgets annuels précis, avec des plannings prévisionnels et nous nous tenons à cette gestion à l’euro près.

Comment vous êtes-vous structurés pour assurer ce développement ?
Jean Valfort

L’erreur que j’ai commise avant le Covid était d’imaginer que l’on pouvait opérer plein de petits restaurants avec un siège hypercéphale. Nous avons complètement changé de modèle pour le décentraliser. Nous avons réduit le nombre de personnes au siège et investi dans de gros établissements avec des directeurs qui ont le rôle de patrons de PME. Nous nous basons sur leurs compétences avec un accompagnement sur les process et les prévisions. Notre modèle est de mettre l’accent sur la gestion opérationnelle des établissements par un directeur de haut calibre.

Qu’attendez-vous de vos partenaires fournisseurs et distributeurs ?
Jean Valfort

La partie la plus importante est la logistique. Ce qui est, de loin, le plus difficile à gérer c’est la livraison. Nous travaillons, par exemple avec le distributeur de boissons D.A.B. Sur les dernières années, il y a eu de gros problèmes d’acheminement d’eau minérale. Ils nous ont trou vé des solutions en permanence afin d’éviter que nous soyons en rupture. Nous ne sommes pas à la recherche du centime dans ce type de relation mais plutôt de la stabilité et de la relation saine où personne n’abuse de personne. Concrètement, sur les boissons, comme nous sommes passés de 10 M€ de CA à bientôt 25 M€ nous commençons à parler en direct avec les alcooliers dans des relations tripartites pour des négociations de tarifs groupe. Cela permet d’améliorer nos marges. Nous avons un food cost entre 23 et 28 % et un F&B cost entre 20 et 22 %.

Quels sont vos projets pour 2025 ?
Jean Valfort

Le projet principal est l’acquisition de deux restaurants sur le Cours Saleya qui sont en cours de travaux. Nous allons les réunir pour ouvrir en avril un même lieu : Le Café des Fleurs. Pour le reste, nous avons fait beaucoup de développement ces derniers temps avec une multiplication quasi par 2,5 du CA en l’espace de deux ans. La restauration est aussi un métier de bilans que nous devons présenter à nos banques. 2025 sera rythmée par cette ouverture et par la gestion optimale de nos adresses pour avoir un groupe bien stable à fin 2025 et poursuivre le développement.

CHIFFRES

• Environ 20 M€ de CA en 2024

• De 30 € à 60 € de fourchette de tickets moyens

150 collaborateurs en saison basse et plus de 300 en saison haute

100 000 couverts servis durant la saison estivale 2024

Chloé Labiche
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