[Top 100] Le commerce de gros face au « temps long »

Jean-Charles Schamberger
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Rémy Oudghiri, sociologue et directeur général de Sociovision

Quels sont les impacts et les opportunités des nouvelles tendances de consommation pour les entreprises du commerce de gros ? Décryptage au travers de l’étude Sociovision présentée lors de l’assemblée générale de la Confédération des grossistes de France (CGF). 

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Philippe Barbier

L’assemblée générale de la Confédération des grossistes de France, le 16 juin, a été notamment marquée par l’intervention de Rémy Oudghiri, sociologue et directeur général de Sociovision (filiale du Groupe Ifop dédiée à la prospective), qui a décrypté les nouvelles tendances de consommation des Français dans la société post-Covid. L’occasion pour Philippe Barbier, président de la CGF, d’inviter les grossistes à travailler sur le « temps long ». 
Ce dernier est en effet convaincu que si un grossiste BtoB veut réfléchir à sa stratégie moyen et long terme, il doit sortir du seul BtoB pour se préoccuper du BtoBtoC : « Il faut qu’il s’intéresse au client de son client, il faut qu’il sache quelles sont les tendances sociétales et de consommation, actuelles et futures, du consommateur final qui vont complètement, ou pas, bouleverser la vie de son entreprise ».
Qu’est-ce que la crise a vraiment changé depuis deux ans ? La chose sans doute la plus évidente est une accélération de la dématérialisation et de la digitalisation (en 2021, 46 % de la société se dit ultradépendante d’Internet, 55 % de la population fait des achats en ligne, 26 % fait ses courses en drive, 22 % se fait livrer à domicile). À noter également que les réseaux sociaux ont gagné de nouveaux publics pendant la crise entraînant un clivage intergénérationnel dans les entreprises en termes de modes de communication.
Autres évolutions, au moins dans les pensées, celle des modes de consommation. Les risques climatiques extrêmes sont perçus comme 1re cause d’insécurité quotidienne pour 59 % des Français (mais paradoxalement, le niveau des écogestes stagne et la consommation de bio baisse). Idem pour l’évolution de l’usage de l’automobile (les trois quarts des Français pensent qu’il faut qu’il y en ait moins demain, qu’il y ait davantage de transports en commun et d’autopartage… mais leur mode de transport préféré reste la voiture !). À noter également : le triomphe de l’occasion et du vintage.
Mais s’il est bien un changement majeur aujourd’hui, c’est celui du rapport au travail, faute de projection dans l’avenir. Un tiers des actifs a du mal à trouver du sens dans son travail, 23 % de la population a envie de changer de métier et les nouvelles générations souhaitent rééquilibrer la place du travail dans la vie (58 % des 25-34 ans). « Les jeunes générations se disent que c’est aujourd’hui qu’il faut vivre », résume Rémy Oudghiri.
Sociovision constate également de nouvelles attentes envers les entreprises. Ainsi la demande de responsabilité sociale continue de progresser et a atteint des niveaux records pendant la crise sanitaire (67 %). Les priorités récentes des consommateurs résident, quant à elles, dans le pouvoir d’achat, la préoccupation croissante pour la santé, le rapport au temps (le manque de temps reste un problème pour près d’un Français sur deux) et une aspiration à une meilleure qualité de vie (19 % des Français souhaitent déménager, soit 4 points de plus qu’en 2020).

Risques et opportunités
Face à tous ces constats, plusieurs risques importants  : une fragilisation de la consommation, des investissements dans la transition écologique longs à rentabiliser, une pénurie durable de main-d’œuvre dans de nombreux secteurs et fonctions, une hybridation des comportements (physiques et virtuels) qui créent de nouvelles concurrences (acteurs 100 % digitaux sur certains secteurs). Si tout n’est pas rose, des opportunités existent : une dématérialisation de la relation client qui permet plus de souplesse et plus de personnalisation pour recréer de la confiance et du lien, des attentes sociétales qui appellent à redéfinir les missions de l’entreprise et à les revaloriser aux yeux des salariés (utilité sociale), et, enfin, une envie de local et de proximité qui dessinent de nouveaux territoires de conquêtes (approvisionnement, services, etc.). Autant d’éléments que le commerce de gros, comme d’autres secteurs, doit intégrer dès aujourd’hui.
 

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Logo CGF

Exit la CGI, place à la CGF, nouvelle Confédération des grossistes de France !

« Il y avait un très large consensus », a précisé, le 16 juin dernier, Philippe Barbier, président de la Confédération des grossistes de France (CGF), à propos de cette démarche de changement de nom visant à instaurer « une identité nouvelle, une unité réaffirmée, une modernité assumée » laquelle arrive également au moment où la confédération déménage, toujours à Paris. Elle a quitté en effet la rue des Pyramides pour s’installer 29-31, rue Saint-Augustin (IIe). Il s’agit, en fait, d’un cheminement mené depuis trois ou quatre ans, qui permet de réaffirmer la nature de l’organisation à travers trois lettres : C pour Confédération, laquelle regroupe 31 fédérations sectorielles ayant des intérêts communs (fiscaux, juridiques, économiques environnementaux, etc.). G pour grossistes : « Cela a été un débat mais nous pouvons être fiers de ce mot. Après discussions, nous avons fait ce choix en nous disant : “N’en ayons pas honte mais modernisons-le, portons-le, affirmons-le” », a commenté Philippe Barbier. F pour France, enfin, parce que le métier de grossiste est national, il maille les territoires et irrigue les villes.

Jean-Charles Schamberger
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