
Top 100 : « Notre stratégie d’ultraservice se montre de plus en plus performante »

Entretien réalisé le 27 juin.
Quel bilan dressez-vous de l’exercice écoulé ?
Yves Cebron de Lisle : Malgré un contexte tendu au deuxième semestre, notamment, nous bouclons une année 2024 en croissance de 2 % en volume et en valeur, ce qui nous mène à un petit peu plus que 1,7 Md€ de chiffre d'affaires.
Nous confirmons notre développement sur les produits extra frais qui ont vraiment permis notre montée en puissance. Nous confirmons aussi notre troisième place du secteur avec un gain de part de marché qui a été publié par Food Service Vision, de + 0,2 point sur un marché qui évolue peu. Notre stratégie, définie il y a cinq ans, de miser sur les filières fruits et légumes, marée, viande fraîche, s’avère payante depuis maintenant trois ans, et nous permet de gagner des parts de marché.
Éric Decroix : En adressant ces gammes cœur d'assiette, nous avons mis en place une stratégie d'ultra-service. Elle pouvait paraître un peu opportuniste au début, mais elle se montre de plus en plus performante. Cela nous encourage beaucoup.
Y.C.d.L. : Dans ce bilan, il y a des secteurs où nous avons des croissances à deux chiffres. Le premium, par exemple, fonctionne très bien, à la fois au niveau des gammes et des équipes de vente.
Vous avez aussi été sélectifs dans votre clientèle…
Éric Decroix : Oui, très sélectifs. Le marché de la restauration se durcit et il faut aller là où nous avons une valeur ajoutée. Inutile d’aller chercher du chiffre pour du chiffre contre un concurrent qui aura peut-être une meilleure valeur ajoutée. Nous avons une réelle discipline. On ne promet pas ce qu’on ne peut pas donner. En revanche, quand on promet et qu’on est en face du bon client, alors là, on donne tout. Cela stabilise notre business dans un contexte qui ne l’est pas.
Y.C.d.L. : Il est important de noter que nous avons de véritables partenaires parmi nos clients grands comptes, nous nous sommes choisis réciproquement. Alors que la consommation se tend, la croissance de nos clients se fait notamment par l’ouverture de nouveaux points de vente, mais pas forcément par la croissance du panier moyen ou du chiffre d’affaires par établissement. Il est donc particulièrement important d’accompagner tous les clients dans cette période surtout sur le moment du déjeuner qui est de plus en plus contraint, où il faut les conseiller dans leur recherche de formules économiques.
É.D. : Il y a beaucoup d’innovation en la matière en ce moment. Nous réussissons à proposer des offres pertinentes et plus créatives. C’est un vrai travail de fond sur le category management pour s’ajuster aux impératifs des restaurateurs.
De quels types sont ces offres ?
É.D. : Nous avons travaillé avec nos fournisseurs pour lancer une grande opération de Summer Deal pour aider tous nos clients sur la restauration durant l’été. Différents produits sortent toutes les semaines avec des prix plus compétitifs que d’habitude et cela va durer pendant toute la période estivale.
Cela signifie que vous allez faire en 2025 encore plus de promotions ?
É.D. : Oui. Nous allons faire des promos, mais nous allons aussi faire des recettes intelligentes. Il faut proposer des articles bien positionnés, mais avec une recette qui soit source d’inspiration pour le client et aboutisse à une assiette globale qui ne coûte pas trop cher au restaurateur.
Y.C.d.L. : Si un restaurant veut proposer une formule à 12 ou 14 €, il ne faut pas qu'il ait plus de 3,50 ou 4 € de coût matière. Cela veut dire qu'il doit avoir une entrée à 90 centimes, un plat à 2 € et un dessert à 90 centimes.
É.D. : Et là, nous bénéficions de tout ce que nous savons faire avec e-Quilibre. Tout le travail que nous avons réalisé depuis des années sur la restauration collective, nous le transposons à la restauration commerciale. Nous n’avons pas le même logiciel, mais nous prenons la même intelligence. Cela fonctionne bien, y compris dans la boulangerie-pâtisserie. Nous bougeons les lignes à l’intérieur de l’entreprise pour répondre avec le plus de simplicité et d’efficacité possible à l’évolution des impératifs du restaurateur aujourd’hui, pour qui l’activité n’est vraiment pas simple.
Qu’avez-vous développé d’autre ?
Y.C.d.L. : En plus de la situation économique avec des tensions sur les prix comme chez nos clients, un point qu’il est important pour nous de considérer, c'est l'imprévisibilité. Cela nous a conduit à accélérer notre stratégie full service en termes de logistique. Nous l’avons mise en test pendant les jeux olympiques à Paris avec un service de conciergerie, et aujourd'hui, nous la déployons. Très concrètement, l’été dernier, dans notre entité de fruits et légumes à Rungis, nous avons par exemple mis en place une équipe de préparation pour des quantités de commandes plus faibles pour des livraisons de dépannage, d’urgence ou plus fréquentes. Nous nous orientons aussi de plus en plus vers la recherche de lieux logistiques qui vont être le plus proche possible des fortes densités de clients, donc le plus près des villes ou de zones touristiques.
É.D. : Sur les zones de fortes densités, pour la logistique intra urbaine, nous sommes en train de déployer des implantations de très haute proximité. Un plan immobilier à cinq ans a été établi, avec deux réseaux qui communiquent entre eux : le réseau des entrepôts traditionnels, standardisés, et un réseau de points de proximité, multi-température, avec un ultra-service, capables de relivrer extrêmement rapidement un restaurateur. Ainsi à Strasbourg, nous avons remodelé un cash & carry en un site de logistique urbaine. A partir d’un assortiment de 15 000 à 20 000 références, toutes gammes confondues, il peut livrer en moins d’1h toute la ville. C'est vraiment notre stratégie proxi.
Ce renforcement des structures suppose donc un renforcement des équipes ?
Y.C.d.L. : Nous travaillons déjà des équipes spécialisées sur la viande fraîche avec notre partenaire Beauvallet. Nous continuons de développer les équipes sur la marée, nous avons par exemple recruté un acheteur en direct sur les criées et puis des spécialistes qui vont conseiller les clients sur le terrain, former nos équipes commerciales. Nous en avons maintenant dans tous les établissements. Les spécialistes des fruits & légumes comme de la marée vont être en charge à la fois de développer le sourcing local, mais aussi de promouvoir les bonnes saisons de vente ou encore les portions qui vont être économiques pour les clients.
É.D. : Dans tout notre réseau, aux côtés de nos clients, des promoteurs de viande, des promoteurs seafood, des promoteurs fruits et légumes, nous avons aussi un conseiller culinaire. C’est-à-dire un chef qui est capable de conseiller sur la mise en œuvre du produit, de créer ou de faire évoluer une carte, de proposer de nouvelles recettes…
Y.C.d.L. : Ensuite, sur la dimension produit, nous avons trois piliers dans le category management. Ils ne sont pas nouveaux, mais plus accentués.
1-L'efficacité économique des produits, avec notamment une grosse accélération des marques propres avec Transgourmet Economy.
2-La durabilité, à travers nos marques Transgourmet Natura et Transgourmet Origine. Et, désormais nous sommes capables de sortir le score carbone d'un fournisseur, et nous pouvons scorer l'impact d'un client, tout ceci avec l’accompagnement de la société Carbon Maps.
3-L'innovation. A cet égard, nous référençons plus de 100 nouveaux produits chaque mois. Nous avons accéléré cette année avec nos fournisseurs mais pas seulement. Nous continuons d’innover sur les gammes phares : la marée, les fruits et légumes, la viande fraîche.
É.D. : Nous essayons en quelque sorte de co-designer la supply de nos clients tout en relevant les enjeux économiques et environnementaux. Pour relever ces défis, il faut jouer collectif : il faut que le client ait une action intelligente dans la gestion de ses approvisionnements, et il faut que le fournisseur puisse suivre le rythme qu'on va lui imposer par rapport aux besoins du client.

Quel partenariat développez-vous avec Ecotable ?
Y.C.d.L. : Sur l’année écoulée, Ecotable a formé le codir de Transgourmet, l'encadrement commercial dans tous nos établissements : des formations autour de l’éco-responsabilité en restauration, couplé à un module autour des achats durables. Et désormais, nous allons déployer des formations pour les clients car cette démarche doit être expliquée. Sortir un rapport d'impact carbone avec un client ne suffit pas, il faut traduire cela en action concrète pour que l'on puisse baisser l'impact carbone, ensemble.
Où en êtes-vous en matière de digitalisation ?
Y.C.d.L. : Nous poursuivons nos investissements en termes d'innovation et de digitalisation avec le déploiement de nouveaux outils. Sur la partie commerce, nous nous appuyons aussi sur l'IA qui vient s'agréger dans des fonctionnalités autour du travail sur les cartes des restaurants. Nous avons dépassé le milliard d'euros de chiffre d'affaires en digitalisation, avec une progression à peu près de 10 % du chiffre d'affaires sur Internet versus l’année passée. A client équivalent, le panier moyen est supérieur en digital. Nous accélérons également nos actions en matière de communication digitale pour acquérir de nouveaux clients, en complément du travail de prospection de nos équipes commerciales.
La période actuelle va-t-elle relancer la concentration ?
É.D. : Oui. Il y a des chances. Et peut-être des concentrations qui vont au-delà de la RHF. Nous restons très attentifs et extrêmement sélectifs.
Quels sont vos critères ?
É.D. : C'est notre business : des acteurs multi-température sur la restauration commerciale, collective ou en boulangerie-pâtisserie. J'aime bien également les ancrages régionaux, plutôt que les grandes acquisitions. Il faut penser global, mais agir local !

ALSACE
Un atelier marée de 400 m²
Transgourmet Seafood a inauguré le 23 juin son nouvel atelier marée implanté à Schiltigheim, dans l’agglomération de Strasbourg (67). Cet outil moderne conjugue équipements de pointe et expertise métier pour proposer une gamme complète de produits de la mer, en réponse directe aux besoins spécifiques des restaurateurs, collectivités et métiers de bouche alsaciens. Grâce à une équipe pluridisciplinaire de 7 personnes composée de professionnels dédiés (fileteurs, télévendeuses, conseillers), il permet de préparer sur place des produits ultra-frais, portionnés ou entiers, conditionnés sous glace ou en barquette, mais aussi des coquillages et crustacés. L’atelier permet également une réponse rapide aux demandes spécifiques, avec une offre sur mesure adaptée à chaque typologie de restauration (traditionnelle, gastronomique, collective, événementielle, traiteur…). En complément, le service s’appuie sur une amplitude horaire élargie (7h à minuit, 6 jours sur 7) et une logistique optimisée permettant des livraisons dès le lendemain.