L'ANMF et France Travail se mobilisent au service de l'attractivité de la meunerie
Désormais, les demandeurs d'emploi savent que les meuniers ne dorment pas. Pour casser les idées reçues autour de la farine et des moulins, l'Association Nationale de la Meunerie Française (ANMF) a signé un partenariat avec France Travail Pro à l'automne 2024. Doté d'une meilleure compréhension de la filière, l'organisme public assure désormais un lien renforcé avec les entreprises.
393 sites pour environ 1 500 postes à pourvoir. La situation de l'emploi en meunerie demeure complexe malgré les efforts mis en oeuvre par l'ANMF. Le dispositif Chasseursdegraines.fr, développé par l'organisation en partenariat avec la Confédération Nationale de la Boulangerie-Pâtisserie Française (CNBPF) et la Fédération des Entrepreneurs de Boulangerie (FEB), vise à améliorer la visibilité des métiers du pain et de la meunerie, avec une campagne associant digital (réseaux sociaux, site internet) et outils de communication traditionnels (affichage en point de vente, sachets à baguette). "Notre site internet, qui a accueilli près de 50 000 visiteurs depuis son ouverture, offre des ressources précieuses pour connaître les centres de formation en boulangerie mais également les entreprises proposant des offres d'emploi", détaille Anne-Céline Contamine, directrice générale de l'ANMF.
Renforcer les liens avec France Travail
Depuis peu, une connexion directe avec les offres publiées chez France Travail a été mise en place sur la carte présentant les moulins en activité sur le territoire. Cela s'inscrit dans le prolongement d'un partenariat de trois ans signé entre les deux organisations le 19 novembre 2024. "Nous souhaitions que les meuniers puissent être accompagnés au quotidien dans leurs recherches de collaborateurs, mais également que les conseillers France Travail disposent d'une meilleur connaissance de nos métiers", poursuit la responsable. A terme, l'ANMF souhaite que l'ensemble de ses adhérents diffuse les offres d'emploi via France Travail. Pour l'heure, seul un poste à pourvoir sur trois est publié par ce biais. Le partenariat a pris d'observer une augmentation de 30% des annonces publiées par les meuniers auprès de l'organisme public. "Grâce au déploiement de France Travail Pro, chaque entreprise dispose d'un conseiller dédié. Nous mettons en oeuvre un dispositif complet pour accélérer les recrutements : immersions en entreprise, job dating en agence ou sur site, recrutement par simulation... Autant de formats particulièrement efficaces, qui permettent aux demandeurs d'emploi de mieux se projeter dans les réalités de l'univers de la meunerie", se réjouit Marie-Christine de Cidrac, directrice de France Travail Pro. En un an, 259 recrutements ont été confiés à France Travail par des meuniers, avec un taux de pourvoi atteignant 84%. Des efforts à poursuivre pour la responsable : "Nous sommes encore en phase de déploiement. Ces premiers résultats nous montrent que cela fonctionne, mais nous pouvons faire plus pour défendre des métiers du vivant, riches de sens et ancrés dans les territoires"
Grands Moulins de Paris, sept sites et 200 métiers
Illustration concrète des efforts déployés par la filière meunière pour développer son attractivité, Grands Moulins de Paris défend une vision moderne et engagée du métier. "Nos démarches visant le zéro accident (baptisée CARE) et au service de la Responsabilité Sociétale des Entreprises (Link by GMP) témoignent du volontarisme de l'entreprise. Ce sont des facteurs d'attractivité pour les collaborateurs", témoigne Hugues Favier, directeur industriel régional Ile-de-France chez Grands Moulins de Paris.
L'entreprise, filiale groupe coopératif Vivescia, observe de fortes tensions pour le recrutement de conducteurs de moulin et d'agents de maintenance, deux postes clé pour assurer le fonctionnement des sites de production. "Non seulement le nombre d'élèves à l'Ecole nationale supérieure de meunerie et des industries céréalières (ENSMIC) s'est réduit, mais les nouvelles générations poursuivent généralement leur formation au delà du Bac+2. Une fois diplômés à Bac+5, il est rare qu'ils acceptent des postes imposant un travail en 3x8", observe le responsable. Pour palier à ces difficultés, Grands Moulins de Paris réalise des formations en interne, aboutissant au passage d'un Certificat de Qualification Professionnelle (CQP). "Le métier de meunier est éminemment technique. Pour former efficacement des collaborateurs à ce poste, il est indispensable de compter sur un cycle d'accompagnement mature, avec des encadrants engagés", observe-t-on au sein de l'entreprise. Malgré cette complexité, des parcours durables se sont initiés de cette façon au sein du moulin de Gennevilliers. Didier, présent sur le site depuis 24 ans, s'est formé grâce à l'aide de ses collègues : "Il m'a fallu près de trois années pour appréhender le métier, savoir analyser les multiples situations et réagir en conséquence" Le meunier doit en effet gérer 8 à 10 processus en simultané, ce qui nécessite de grandes qualités organisationnelles. Pour répondre à ses besoins, l'entreprise peut alors être amenée à rechercher des profils à l'étranger. C'est le cas de Bassam, formé à l'IFIM -équivalent Marocain de l'ENSMIC-, qui a été recruté par Grands Moulins de Paris. "Ici, notre objectif est de fabriquer de la qualité du premier coup. Nous avons la même ambition pour nos recrutements", confie Hugues Favier.
Donner une nouvelle image du métier aux jeunes
Les sites industriels que représentent les moulins modernes sont bien éloignés de l'image que peuvent encore entretenir les nouvelles générations. Adrien, formé pendant cinq ans au génie industriel dans une école d'ingénieurs, "ne s'attendait pas à travailler dans un site de huit étages, doté de processus complexes" en rejoignant un entreprise de meunerie. C'est pourtant son quotidien chez Grands Moulins de Paris. Embauché à la suite d'un stage, il gère à 27 ans une trentaine de collaborateurs au sein de l'activité de mélange de Gennevilliers : "Ce métier associe tradition et modernité", résume-t-il. Reste cependant que le meunier coopératif peine à passer ces messages, ce qui peut l'amener à connaître des difficultés majeures dans ses activités quotidiennes. "A une époque, 30 postes étaient à pourvoir sur le site de Gennevilliers. Cela ne nous permettait plus de tenir nos engagements vis à vis de nos clients", se souvient Hugues Favier, pour qui il sera indispensable de "dépoussiérer l’image de la meunerie : elle ne correspond plus à la réalité du terrain et des entreprises", tout en sensibilisant les jeunes à l'importance du contact avec la production, alors même qu'une aspiration forte à l'enfermement dans le confort des bureaux est à noter.