Défis sociétaux : le commerce de gros joue collectif
Alors que la pandémie de Covid a fortement impacté leurs activités, les grossistes proposent aux candidats à la présidentielle de mettre en œuvre un nouveau pacte public-privé rassemblé autour de 4 chantiers prioritaires.
La Confédération du commerce de gros et international (CGI) -qui devrait changer bientôt de nom et de sigle- préfère coconstruire et anticiper plutôt que d’être dans la réaction et sur la défensive... Il est vrai qu’en réunissant 32 fédérations de grossistes distributeurs BtoB de tous les secteurs de l’économie (foodservice, distribution de pièces automobiles, second œuvre du bâtiment, répartition pharmaceutique, etc.), employant 900 000 salariés et réalisant quelque 800 Md€ de chiffre d’affaires, cette vaste organisation professionnelle ne manque pas de dossiers sur lesquels elle veut faire entendre sa voix. Avec une forte envie de prendre son destin en main plutôt que de se voir imposer des législations non applicables ! La CGI vient ainsi de mettre en forme 4 séries de propositions à l’attention des candidats à l’élection de la Présidence de la République, soit 4 chantiers prioritaires répondant à chaque fois à des défis sociétaux : 1-Mettre en œuvre une logistique urbaine réaliste ; 2-Simplifier le cadre fiscal et juridique ; 3-Répondre aux enjeux environnementaux ; 4-Stabiliser la formation professionnelle (voir synthèse ci-dessous).
Ces propositions, qui seront relayées notamment par le Medef et France Logistique, et utilisées lors des contacts de la CGI avec les cabinets ministériels, s’inscrivent parfaitement dans le rôle de la confédération, lequel consiste à faire connaître, défendre et fédérer des filières d’activités différentes mais qui assurent un rôle économique identique. Ces filières sont confrontées aux mêmes menaces stratégiques, elles ont les mêmes enjeux, les mêmes facteurs clés de succès, et elles affrontent les mêmes problématiques fiscales, économiques et sociales, de formation, de logistique, de recyclage des déchets, etc. « Cette "Maison des fédérations" est certes peu connue, mais elle a un rôle extrêmement important dans l’économie française. Nous n’avons rien de particulier à revendiquer, nous disons juste : écoutez-nous ! », explique Philippe Barbier, président de la CGI, à propos de cette démarche collective consistant à s'emparer de sujets, à peser dans le débat et à essayer de transformer des contraintes en opportunités.
Déjà, la gestion de crise durant la pandémie et les nombreuses démarches constructives de la CGI (liste S1 bis, etc.) avait permis au commerce de gros d’être « connu et reconnu » dans les cabinets ministériels. Aujourd’hui, ce bilan Covid se veut plutôt rassurant selon le président de la CGI : « Si cela s’arrête vraiment, et avec l’aide des pouvoirs publics, nos différentes filières grossistes ont traversé la crise le moins mal possible ». Il n’en demeure pas moins que, sur le plan économique bouleversé (pénurie de matières premières, hausses des prix de l’énergie, pénuries d’effectifs, tensions salariales…), il faudra s’attendre à répercussions tarifaires. « Nous avons des hausses de prix dans les différents secteurs qui vont être à 2 chiffres », annonce Philippe Barbier.
Synthèse des propositions de la CGI
1-Mettre en œuvre une logistique urbaine réaliste
80 % de la clientèle professionnelle des grossistes se trouve en centre-ville. À l’heure où les confinements successifs ont montré l’attachement des Français envers leurs commerces de proximité, les grossistes appellent à la mise en œuvre d’une logistique urbaine réaliste, qui garantisse l’accès de nos professionnels aux centres-villes. Concrètement, les grossistes proposent de :
• Sanctuariser d’ici à 2024 des aires urbaines de livraison et autoriser les opérateurs à accéder aux zones à faibles émissions (ZFE-M) des métropoles de plus de 150 000 habitants ;
• Déployer des chartes de logistique urbaine durable via le programme InTerLUD pour renforcer des espaces de dialogue entre les pouvoirs publics et les acteurs économiques privés ;
• Créer un observatoire national de la logistique (proposition du rapport Idrac/Jean/Bolzan) pour donner une hauteur de vue propice à un pilotage stratégique de l’activité ;
• Favoriser une offre de véhicules propres et l’accompagner par des aides financières et fiscales.
2-Simplifier le cadre fiscal et juridique
En matière commerciale, au moins 6 lois impactant directement les grossistes ont été adoptées au cours des 8 dernières années. Les entreprises du commerce de gros, à l’instar des autres entreprises françaises, ont besoin d’une plus grande stabilité et pérennité du corpus juridique. Concrètement, les grossistes proposent de :
• Supprimer les trois impôts de production que sont la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom) et la cotisation foncière des entreprises (CFE) ;
• Garantir une stabilité juridique suite à la publication d’une nouvelle loi ou d’un nouveau texte réglementaire pour permettre aux entreprises d’engager les transformations ;
• Pérenniser notamment les règles applicables aux grossistes en matière de négociations commerciales (obligations et formalisation contractuelle du titre IV du livre IV du code de commerce).
3-Répondre aux enjeux environnementaux
Le commerce de gros est un secteur engagé dans une trajectoire environnementale vertueuse, mais les entreprises qui le composent doivent pouvoir opérer les transformations et changements requis de manière pragmatique. Concrètement, les grossistes proposent de :
• Laisser un temps suffisant aux entreprises pour opérer les transformations et investissements nécessaires pour satisfaire aux exigences environnementales ;
• Fixer des modalités pratiques adaptées aux distributeurs professionnels pour les REP des filières à venir ;
• Accompagner systématiquement les entreprises dans la mise en œuvre des nouveaux dispositifs environnementaux, dès lors qu’ils nécessitent des investissements lourds pour les opérateurs économiques.
4-Stabiliser la formation professionnelle
Le commerce de gros est un secteur pourvoyeur d’emploi, avec environ 85 000 nouveaux recrutements par an et 19,5% des entreprises de la branche qui recrutent en contrat d’apprentissage. Il est désormais nécessaire d’aller plus loin en matière de formation des salariés. Concrètement, les grossistes proposent de :
• Réaliser un bilan de l’impact réel de la contribution unique à la formation professionnelle pour les entreprises ainsi que les dispositifs et, le cas échéant, réorienter la répartition des fonds ;
• Rapprocher l’offre (école) de la demande (entreprise) via le développement de partenariats et une mobilisation des régions pour répondre aux défis de l’orientation des jeunes ;
• Faire connaître aux entreprises l’offre de formation en matière d’alternance en procurant une visibilité nationale aux différents centres de formation d’apprentis (CFA) existants ;
• Tenir compte, à travers une exonération ou un crédit d’impôt, des investissements déjà réalisés par les entreprises en termes de formation et d’apprentissage.