[Top 100] Les distributeurs dans une dynamique positive

Jean-Charles Schamberger
Image
Michael Ballay FSV

Les récentes crises successives ont ébranlé fortement le marché de la distribution foodservice et une consolidation est en route. Avec deux constats à la clé : les assortiments ne se sont pas réduits et les démarches RSE se sont poursuivies.

Partager sur

REVUE BUSINESS DISTRIBUTION DE FOOD SERVICE VISION

Selon Food Service Vision, qui a publié au printemps l’édition 2022 de sa Revue Business Distribution, la distribution structurée a payé un lourd tribut à la crise, avec une perte de chiffre d’affaires de plus de 3 Md€ entre 2019 et 2021. En 2021, le marché s’est redressé de 13 % (soit la moitié du chemin effectué pour retourner au niveau de 2019), mais ce résultat a surtout été tiré par la performance des réseaux spécialisés en boulangerie et les cash & carry. Si les leaders Metro, Groupe Pomona, Transgourmet, France Frais et C10 ont accru leur part de marché à 58,6 %, contre 57,2 % en 2019, pour autant le secteur reste assez fragmenté, avec 18 acteurs qui représentent entre 1 et 6 % du marché, constate Food Service Vision. 
De nouveaux distributeurs s’intéressent au secteur et proposent des produits locaux (La Ruche qui dit Oui ! Pro…) ou se spécialisent dans les produits vegan (Vegetal Food). De nouvelles solutions se positionnent en intermédiaires entre les restaurateurs et leurs fournisseurs (Choco, Supli…). Le marché de la distribution foodservice se caractérise également par des gammes élargies (produits labellisés, origine France, bio, locaux) correspondant bien aux nouvelles tendances grandissantes des utilisateurs finaux, et de nouveaux canaux (produits et préparations destinés à la restauration rapide et au snacking, particulièrement adaptés à la livraison et à la vente à emporter). «  Même si l’introduction d’innovations a été ralentie, notamment sur l’année 2020, l’accélération de 2021 a été notable sur l’offre de nouveautés et l’on reste aujourd’hui, au global, sur un élargissement des assortiments chez les distributeurs. On pourrait faire le même constat sur les forces de vente : on a retrouvé en 2021 les effectifs d’avant-crise. Ce qui traduit une dynamique positive des distributeurs, tout au moins un retour à la normale », commente Michaël Ballay, directeur associé chez Food Service Vision. Les stratégies RSE, quant à elles, sont de plus en plus affirmées et n’ont pas été ralenties par cette crise. « En effet, deux principales raisons à cela : d’abord ce sont des engagements pris au plus haut niveau dans les entreprises et il y avait donc une nécessité de mise en place ; ensuite, ces démarches sont généralement menées par des équipes dédiées et cela a continué pendant la crise », observe Michaël Ballay. 
Enfin, une préoccupation centrale domine le marché : la hausse des prix. La Revue Business Distribution évaluait à fin juin 2022 que les tarifs généraux des distributeurs avaient progressé de 12,3 %, contre 4,4 % à la même période de 2021. 
 

Image
François Blouin FSV

« Accompagner cette inflation sans être trop gourmand »

3 questions à… François Blouin, président fondateur de Food Service Vision
Entretien réalisé le 13 juin

Quel est le contour du marché de la distribution foodservice structurée que vous évoquez dans votre Revue Business Distribution ?
Ce marché de la distribution foodservice structurée, produits et boissons, réalisée par les 26  leaders, s’élève à 15,6 Md€ HT* en 2021 contre 18,8 Md€ en 2019. On assiste à la consolidation de la part de marché des 5 leaders que sont Metro, Groupe Pomona, Transgourmet, France Frais et C10 avec 58,6 % en 2021, contre 57,2 % en 2019. À l’échelle du marché de la restauration, c’est plutôt rapide car celui-ci évolue d’habitude assez lentement. Metro consolide sa part grâce à la résilience du modèle du cash & carry et grâce à Pro à Pro, quant à Pomona, c’est en particulier grâce à l’acquisition de DGF.
Autre fait marquant : la prise de part de marché de Transgourmet, qui s‘explique également à la fois par sa résilience en termes de modèle et son exposition à différents segments de restauration. Notamment son bon positionnement sur les marchés de la boulangerie-pâtisserie, et aussi par la perte de position des distributeurs de boissons lesquels ont été plus impactés que les autres par ces années de crise.

Quels sont les opérateurs les mieux armés aujourd’hui ?
Ce qui est sûr, c’est que les acteurs qui sont les plus à même de se positionner en sortie de crise sont ceux qui ont su accompagner la transformation du marché pendant la crise. Ceux qui ont su demeurer au plus près de leurs clients restaurateurs, ceux qui ont su rester ouverts le plus longtemps possible, ceux qui ont su garder des entrepôts et des tournées actives, ceux qui ont su réajuster leur offre et leurs gammes au plus près des besoins de marché et des nouvelles attentes. Des attentes notamment de gammes de produits RSE, de produits locaux, de produits bio. Et aussi ceux qui ont su réinventer la dynamique commerciale à la reprise. Car la ligne de crête aujourd’hui, c’est d’accompagner cette inflation sans être trop gourmand mais positionné au juste prix, tout en restant au service de ses clients et compétitifs. 
À très court terme, le marché repart. À la rentrée, je pense que les gagnants seront ceux qui auront su garder cette proximité, partager la souplesse dont ils ont besoin, continuer à fournir leurs clients en leur proposant des produits de substitution et d’autres sourcings, tout en sachant l’expliquer. 

Faut-il s’attendre à une concentration du marché ?
On peut clairement s’attendre à des consolidations nouvelles dans le secteur. Il y a des acteurs qui ont des positions historiques mais qui n’ont peut-être plus la capacité à mener l’intensité du jeu concurrentiel de demain. Le marché de la distribution a été éprouvé par cette crise. Certains opérateurs vont chercher à grossir, d’une part, pour mieux peser sur leurs fournisseurs et réduire les effets d’inflation, d’autre part, parce qu’il y a la nécessité d’investir de plus en plus, ne serait-ce que pour gérer les différentes réglementations, maîtriser sa démarche RSE, la digitalisation de ses canaux de vente et sa logistique. Il s’agit d’un métier d’investissements lourds.

*Répartition du CA : distributeurs généralistes : 46,7 % ; cash & carry : 19,9 %, spécialistes boissons : 14,8 %, spécialistes boulangerie-pâtisserie : 10,6 %, spécialistes fruits et légumes : 8 %.
 

Jean-Charles Schamberger
Partager sur

Inscrivez-vous gratuitement à nos newsletters

S'inscrire