[Interview] Charles Dorémus : Au Bureau maintient le lien

Chloé Labiche
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Charles Dorémus, directeur général d’Au Bureau.

Si Au Bureau ( Groupe Bertrand ) a fermé tous ses établissements durant le premier confinement, à la seconde fermeture l'enseigne a proposé de la livraison et/ou du click & collect dans un tiers du réseau. Charles Dorémus, son directeur général, revient pour Zepros sur la façon dont l'entreprise a vécu et géré la crise. Mais aussi sur l'ambition toujours forte d'Au Bureau qui prépare une vingtaine d’ouvertures en 2021 pour un réseau qui en comptait 152 fin décembre.

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Comment l’enseigne a vécu la crise et ses différentes phases ?

Nous avons d’abord été tous stupéfaits au premier confinement et avons mis le réseau complètement à l’arrêt. Ensuite nous avons redémarré en juin assez rapidement. Nous avons été réactifs malgré un cruel manque de visibilité. Non seulement nous avions nos équipes et nos clients à remobiliser mais aussi nos fournisseurs, le fameux écosystème dont on parle davantage aujourd'hui. Nous avons proposé une carte réduite avec 50 % de l’offre au redémarrage pour la food et 100 % pour l’offre limonade. Les clients ont été globalement au rendez-vous. Nous avons accusé un petit recul par rapport à l’été précédent car nous avons perdu la clientèle familiale. Mais nous avons démontré la solidité commerciale de l’enseigne et sommes parvenus à remettre progressivement en place 100 % de l’offre, les opérations marketing et les différentes activations qui font cet ADN si joyeux et convivial d’Au Bureau.

Comment avez-vous appréhendé le deuxième confinement ?

Nous avons vécu avec moins de stupéfaction ce que nous pouvons quand même qualifier de « descente aux enfers ». Ce 2e confinement est arrivé par étapes successives et assez incompréhensibles. Pour notre métier, cela s’est organisé à tâtons avec une série de couvre-feux pas clairement dessinés. Cela a été extrêmement brouillon et ce fameux manque de visibilité, que nous déplorons et que nous subissons toujours, a été complexe. Contrairement à la première vague, les activités ne se sont pas arrêtées du jour au lendemain. Très vite nous avons compris que le midi uniquement ne pourrait pas être viable malgré la solidité commerciale de l’enseigne. Nous avons commencé à fermer des établissements. Puis est intervenue la fermeture administrative totale. Nous avons d’emblée maintenu une activité de click & collect et de livraison sur les sites où cela était possible.

Que représentent ces nouveaux canaux de distribution ?

Nous proposons la livraison, le click & collect ou les deux dans un gros un tiers du réseau avec des niveaux de rentabilité très variables selon les sites. C’est une activité qui permet de garder le lien avec nos clients, ce n’est pas rien. En management on parle beaucoup de lien avec les équipes mais en commerce on parle de lien avec les clients aussi. Cela permet également de soutenir cet écosystème tant fragilisé avec des fournisseurs en alerte maximale. C’est aussi un marché où nous sommes enfin présents avec Au Bureau et qui sera porteur pour deux raisons : la reprise est plus facile quand il y a un tremplin sur lequel vous êtes actif. Le client connaît le chemin, vous avez fait tourner la boutique, les frigos ne vont pas tomber en panne le jour où les réarmera etc. Enfin, ce marché, dans lequel les clients ne se retrouvaient pas forcément car ils méconnaissaient l’offre, sera finalement très complémentaire de nos activités de restauration en salle. Ce genre de crise est un accélérateur pour la compréhension des exploitants et pour la compréhension des clients.

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Comment gérez-vous cette crise d’un point de vue RH ?

C’est en cela que nous avons besoin de visibilité. Quand on parle de l’écosystème des producteurs, des collaborateurs, des chefs d’entreprise, des entreprises elles-mêmes, vous ne faites pas la même chose si on vous dit que vous êtes fermés 15 jours ou 6 mois. Vous n’allez pas former des collaborateurs à la reprise sans savoir quand cela va intervenir. Ce serait plus facile de piloter si nous avions un horizon. C’est aussi valable pour les aides : avoir de la visibilité sur leur maintien pendant la crise et après. Si l’État ne poursuit pas son soutien aux acteurs de la restauration tout aura été vain. D’où la pertinence du combat sur la TVA à 5,5 % pour permettre de rembourser la dette supplémentaire générée par le PGE. Et ça, il faut le lancer maintenant. Il faut sortir de ce qui a été imposé par le contexte sanitaire c’est-à-dire l’urgence dans la gestion de la crise. Il ne faut pas attendre de savoir quans on va rouvrir pour savoir comment on va aider. Ce manque d’anticipation et de prise de décision manque cruellement à l’État et à ses acteurs économiques.

Comment préparez-vous et envisagez-vous la reprise?

La seule certitude c’est que nous allons gagner et passer cette crise. C’est un atout d’être un franchiseur fort. Le reste est incertain. Tous les 15 jours nous établissons un plan. Les saisons, les produits, les fournisseurs, les cartes changent selon la saison. En termes d’activation et d’opération marketing, là encore rien n’est pareil entre le 15 janvier et le 15 avril, nous sommes obligés de réadapter en permanence et de faire des plans A,B, C, D. Nous serons forcément sur une carte serrée, le temps de réarmer. Ce sera moins difficile cette fois car tout ne s’est pas arrêté mais la remontée des stocks et des volumes prendra au minimum une quinzaine de jours. Mais nous sommes assez sereins : les clients auront envie d’aller au restaurant, de faire la fête, de se voir, de manger, de boire des verres etc.

Est-ce que l’on continue à faire des projets dans ce contexte si difficile ?

Plus que jamais ! La solidité du réseau, d’une enseigne, d’un entreprise, se fait toujours par son développement. Je suis sans cesse en déplacement pour valider de nouveaux sites, recruter des candidats à la franchise qui répondent toujours présents. Nous maintenons notre ambition annuelle d’une vingtaine d’ouvertures, selon le temps qui nous sera imparti bien sûr. En 2020 nous avons quand même ouvert 14 établissements et créé 500 emplois. Nous n’avons pas pris de retard en dehors du temps de fermeture. Au contraire. C’est la même vision sur 2021 et 2022 : beaucoup de reports et de décalages d’ouvertures mais toujours la même ambition. Pas de fermetures liées au contexte et nous nous bagarrerons pour cela.

Propos recueillis par Chloé Labiche

Chloé Labiche
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