[Jean Valfort, Panorama Group] : « Moins de symboles et plus de pragmatisme »

Chloé Labiche
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Indépendant
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Restaurateur et fondateur de Panorama Group (Astair, Canard & Champagne, Farago, Zola ! et Bocca), Jean Valfort fait partie des bons élèves des règles sanitaires, appliquées à la lettre dans ses établissements parisiens et dans son tout nouveau lieu niçois baptisé Bocca. C’est donc avec incompréhension et désarroi qu’il a accueilli les annonces gouvernementales d’hier. Interview.

Comment avez-vous reçu les annonces exprimées hier par le Ministre des Solidarités et de la Santé Olivier Véran ?

J’ai l’impression que le gouvernement hésite par rapport à la réaction suscitée par leur décision de fermer les restaurants à Marseille la semaine dernière. Décision que j’ai d’ailleurs trouvée hâtive et illogique. Mais cette indécision nous met dans une situation particulièrement instable. Nous préparons les équipes à l’éventualité d’une fermeture, nous veillons aux stocks, à ne pas sur-commander… Mais si nous restons ouverts, nous risquons des ruptures la semaine prochaine. Depuis 15 jours, cela redémarre à Paris. Les terrasses éphémères qui nous faisaient concurrence se vident et nos établissements se remplissent. Nous sortons juste la tête de l’eau. Comme d’habitude nous sommes dans l’attente, on ne sait pas ce qui va se passer. On n’ouvre et on ne ferme pas un restaurant aussi facilement qu’un appartement !

Quelle responsabilité endosse la restauration dans ce contexte de crise sanitaire et d’indicateurs à la hausse ?

Nous avons un rôle certain et absolu : nous sommes un lieu de rencontre. Nous sommes l’opposé du confinement. Mais nous sommes montrés du doigt alors que nous ne sommes pas le plus gros vecteur de contamination en France. Les universités, le métro parisien plein à craquer le matin ou les supermarchés ne sont pas fermés. Deuxième point : tout l’été certains ont joué le jeu et d’autres non. Nous avons réduit le nombre de couverts, masqué nos salariés même par grosses chaleurs, offert du gel hydroalcoolique, refusé les tables de plus de 10 personnes, n’avons installé personne au bar…

Nous avons fait notre travail de contrôle. À côté de cela il y a des gens qui n’ont rien respecté et il ne s’est rien passé. Personne n’a été fermé à ma connaissance. Le problème est qu’on ne sanctionne pas ceux qui ne jouent pas le jeu, à la fin on sanctionne tout le monde. C’est particulièrement injuste. Il ne faut pas croire que parcequ’on va fermer les restaurants on va empêcher les gens de se rencontrer. Ils le feront mais certainement dans un cadre moins sécurisé que dans celui d'un restaurant.

Qu’attendez-vous du gouvernement dans les jours et semaines à venir ?

Une simple application de la loi. Qu’il contrôle les établissements, qu’il félicite ceux qui respectent les normes et permettent aux gens de sortir dans un cadre contrôlé, qu’ils sanctionnent ceux qui enfreignent la loi. Et qu’il le fasse savoir.

Que pensez-vous des propositions de mesures sanitaires renforcées ?

Nous avons déjà des mesures qui sont hyper strictes même parfois loufoques comme devoir se masquer pour se laver les mains aux toilettes quand on est tout seul. Il faut arrêter avec le symbole et se demander ce qui est utile et ce qui ne l’est pas. Je ne suis pas contre le plus de sanitaire, c’est même un élément crucial de nos restaurants, mais il faut que ce soit dicté par le bon sens et pas seulement pour se couvrir ou faire de l’image. J’aimerais qu’on en arrête avec les symboles et qu’on rentre dans une logique plus pragmatique.

Propos recueillis par Chloé Labiche

Chloé Labiche
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