[Top 100] Benoît Feytit (Metro) : « Nous voulons être des facilitateurs du retour à la normale »
Entretien avec Benoît Feytit, directeur général de Metro France.*
Comment s’est déroulé ce début d’année pour Metro France ?
Rappelons que notre exercice fiscal commence début octobre. À l’heure où nous nous parlons [20 mai, NDLR], nous terminons donc le huitième mois de notre exercice. C’est-à-dire que nous allons subir tout le choc de la crise sur notre 2e semestre. Jusqu’à fin février, tous nos segments et secteurs stratégiques étaient en plein développement. Nous étions en train de faire une très bonne année. Depuis la mi-mars, c’est un choc d’une violence inouïe pour tous nos clients restaurateurs – et c’est avant tout à eux que je pense –, et pour toute la filière, qu’il s’agisse des grossistes, des producteurs, des agriculteurs. Et les perspectives ne sont pas encore tout à fait claires.
Aujourd’hui, nous ne pouvons plus parler de tendance. Nous avons une baisse d’activité massive comme tous ceux qui servent la restauration. Nous avons la chance de servir encore les métiers de bouche, c’est-à-dire la rue marchande – boulangers, pâtissiers, bouchers, charcutiers, traiteurs, épiciers et primeurs – qui représentent 25 % de notre activité en temps normal. Nous avons développé le business avec eux. L’option que nous avons choisie, c’est de mieux accompagner ces clients qui sont en première ligne et qui sont là pour servir les clients finaux. Nous avons décidé de ne pas les court-circuiter en n’ouvrant pas nos entrepôts à tous les publics. Grâce à nos 98 sites en France, je pense que nous avons joué un rôle important dans l’approvisionnement des petits commerces, du mieux que nous pouvions, en produits frais, en produits secs et en produits non alimentaires.
Tous vos entrepôts sont-ils restés ouverts ?
Oui. Il aurait pu y avoir des fermetures mais nous avons choisi de laisser les sites ouverts, pour les petits commerçants et pour la restauration rapide qui a livré ou fait de la vente à emporter. Malgré la perte d’exploitation liée à l’arrêt de l’activité de la restauration traditionnelle, notre rôle était de servir l’ensemble de ces petits commerces. J’en profite pour rendre hommage à la fois à nos clients qui, coûte que coûte, ont continué de servir les particuliers, et à mes équipes, qui ont su s’adapter et réagir pour qu’il n’y ait pas de rupture dans la chaîne alimentaire pour fournir ce commerce traditionnel.
Ce n’est d’ailleurs pas votre seul engagement…
En effet, nous avons été un grand partenaire de la grosse opération #leschefsaveclessoignants. Celle-ci a mobilisé près de 800 chefs et nous les avons approvisionnés pendant presque deux mois, à titre gratuit, en marchandises qui leur ont permis de cuisiner des repas dans 142 hôpitaux, pas seulement pour nourrir les populations hospitalières, mais pour leur donner du réconfort.
Quels accompagnements dédiés à la restauration indépendante, très fragilisée, allez-vous mettre en place ?
Notre cible n’a pas changé. Nous ne servons ni la restauration collective ni les très grandes chaînes de restauration. Nous avons énormément d’initiatives pour le redémarrage et notamment un plan d’accompagnement en matière de trésorerie. Metro a bien l’intention d’être là encore en première ligne pour accompagner nos clients lors de la reprise d’activité. Nous voulons être des facilitateurs du retour à la normale pour nos clients restaurateurs.
La relance passera principalement par 3 éléments. D’abord, une aide au redémarrage financier avec des possibilités de paiement que l’on n’a pas l’habitude de faire chez Metro. Ensuite, un effort tarifaire, afin de permettre d’acheter au meilleur prix et minimiser l’impact du rachat des matières premières. Enfin, en proposant l’ensemble des gammes produits d’hygiène et d’emballages offrant la possibilité à chacun de faire au mieux son travail et afin que nos clients puissent rassurer leurs consommateurs et leurs personnels.
Concernant l’hygiène, outre les équipements et les produits de nettoyage, nous avons rédigé et construit un Guide spécial réouverture que nous avons établi avec le conseil scientifique de Metro, à savoir : des médecins, des vétérinaires, des chefs. Il s’agit d’une boîte à outils disponible en ligne gratuitement sur metro.fr de manière à aider les professionnels à mettre en place les nouvelles règles conformes au protocole sanitaire renforcé, à sensibiliser et rassurer leurs équipes et informer leurs clients.
Concernant nos emballages, il y a tout un axe de développement important, de manière à ce que l’on puisse faire de la cuisine traditionnelle et la livrer ou la proposer à emporter au moyen d’emballages efficaces et durables.
Revenons sur votre exercice 2018-2019, de septembre à octobre. Comment s’est-il déroulé ?
Il a été très positif et nous avons bien développé les affaires… mais cela paraît tellement loin ! Quand allons-nous récupérer le chiffre de 2019 ? Il y a tellement d’inconnues que cela est très complexe à déterminer. Ce qu’il faut retenir, c’est qu’avant tout nous sommes concentrés sur l’accompagnement de nos clients pour la reprise. Ce qui nous soucie, c’est moins Metro que l’état de santé de nos clients. C’est pour cela que nous allons mettre un dispositif très important pour le redémarrage, et, en tant que leader, cet accompagnement doit être fait pour toute la filière.
Qu’en est-il des projets qui étaient en cours ?
Un certain nombre ont été retardés. D’autres sont poursuivis. Nous avons repriorisé nos grands projets à moyen et long terme. Une fois encore, ce qui nous occupe le plus est le redémarrage. Toute la puissance de Metro est concentrée sur ce sujet et sur son accompagnement.
*Entretien réalisé le 20 mai.
Propos recueillis par Jean-Charles Schamberger
Un accompagnement pour la reconquête
Dès le début de la crise, Metro a mis en ligne un accès facile et simplifié aux différentes aides et mesures mises en place par le gouvernement afin d’aider les restaurateurs, avec notamment une hotline dédiée. « Il nous a fallu quatre semaines pour préparer notre Guide spécial réouverture. L’objectif étant d’aider les restaurateurs à bien se préparer, à savoir ce qu’il faut mettre en place pour le jour J, à leur fournir des conseils utiles pour les aider à développer des activités qu’ils n’avaient peut-être pas mises en place jusqu’à maintenant », précise Frédéric Bourcy, directeur du marketing et de la communication de Metro France. Ce guide téléchargeable sur le site metro.fr a un pendant d‘offres Hygiène et VAE qui ont été envoyées début juin.
Tout le plan de communication a été adapté depuis début mai (engagement sur les prix, notamment sur ceux des MDD, bloqués jusqu’à fin août). Beaucoup de conseils également, en matière digitale (développement de sites internet, d’utilisation des réseaux sociaux, de modules de commande en ligne), mais aussi en termes d’aménagement de cuisine, de conception de carte, de simplification de l’offre pour la VAE, etc. « Quelle que soit la problématique du client, Metro se doit d’être présent et de tenter de lui apporter les réponses qu’il recherche. Nous voulons être un partenaire à 360° », commente Frédéric Bourcy. Les premiers webinaires, avec des conseils d’experts, ont également reçu un bon accueil (500 participants) et devraient être réitérés.