Yann Vallée, Sysco : « Promouvoir le meilleur, s’interdire le pire et améliorer le reste »

Olivier Bitoun
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Yann Vallée, directeur de la qualité et du développement durable de Sysco France

Né de la fusion entre Brake et Davigel en 2018, Sysco France figure dans le peloton des grands distributeurs généralistes en France. Sa politique RSE se veut holistique, comme nous l’explique Yann Vallée, directeur de la qualité et du développement durable.​​​​​​​

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Quels sont les grands axes de la stratégie RSE chez Sysco France ?

Notre stratégie se décline selon trois axes : les enjeux humains, la promotion d’une offre alimentaire durable, notamment via un sourcing responsable, et le respect de la planète avec les questions liées à l’environnement. J’ai représenté notre dernier programme RSE au Comex de Sysco France à l’automne 2020. Il contient des engagements chiffrés pour les cinq ans à venir (2020-2025) qui seront publiés cet été. Si ce type de présentation n’a rien de nouveau, il faut signaler que nous sommes convenus de faire désormais le point avec le Comex deux fois par an au lieu d’une. C’est un des signes de l’importance prise par la RSE dans la stratégie de Sysco.

 

Quels sujets placez-vous sous le chapitre de « l’humain » ?

Avant tout, il s’agit des enjeux liés aux collaborateurs de Sysco : santé et sécurité, non-discrimination et égalité des chances, développement des compétences... Au-delà, comme l’alimentation est un des premiers facteurs de notre santé, nous veillons tout particulièrement à la composition de nos produits. C’est ainsi que nous avons pris la décision de supprimer 89 additifs alimentaires de nos produits d’ici à 2025, tels certains conservateurs pourtant toujours autorisés par la réglementation. Nous y ajoutons une liste de 37 additifs que nous n’éliminons pas mais dont nous réduirons l’utilisation. Cette décision va nous amener à réexaminer nos recettes et à trouver des solutions de substitution avec nos services R&D et nos équipes achats. Chez Sysco France, nous possédons trois usines agroalimentaires (cf. encadré) où nous pouvons facilement effectuer des tests de préindustrialisation autour d’ingrédients alternatifs. Mais, dans tous les cas, la modification d’une recette doit obligatoirement recevoir la validation de nos chefs avant d’être acceptée.

Pour nous, l’humain signifie aussi la solidarité. Chaque année, nous donnons aux associations caritatives des produits, même si nous agissons pour réduire le gaspillage en amont. En 2020, avec la fermeture des restaurants, les invendus ont été plus conséquents surtout au moment du premier confinement qui a pris tout le monde de court. L’an dernier, nous avons donné environ 700 000 équivalents repas, soit plus de deux fois plus qu’une année normale.

 

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Yann Vallée, directeur de la qualité et du développement durable de Sysco France
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Vous faites la promotion d’une « offre alimentaire durable ». Qu’est-ce que ça signifie concrètement ?

Je vais vous donner deux exemples ; le premier dans les produits de la mer. En plus de notre partenariat avec le WWF, nous coopérons avec SFP (Sustainable Fisheries Partnership), une ONG qui réalise chaque année l’inventaire de nos produits de la mer. Afin de vérifier que les pêcheries qui nous fournissent ne basculent jamais en zone rouge, celles où les stocks halieutiques sont insuffisants. Actuellement, 80 % de nos achats de produits de la mer sont garantis par ces ONG pour leur durabilité ou labélisés MSC/ASC. Seuls 20 % de nos achats proviennent de pêcheries en zone orange sur lesquelles nous ne disposons pas d’assez de garanties en termes de durabilité. Par exemple, certaines pêcheries à l’origine de ces produits intègrent un programme d’amélioration dit FIP (Fishery Improvement Project) pour trouver la voie vers une exploitation plus vertueuse. En 2020, Sysco France a contribué au financement de 3 FIP à hauteur de 43 000€ ; des sommes qui seront investies dans des instruments (sonars, sondes, préaudits…) leur permettant de mesurer le niveau des stocks de poissons, notamment. Le deuxième exemple, je le prends dans notre dernière carte printemps-été. C’est celui du poulet noir, une gamme que nous développons avec un éleveur breton. Nous l’avons pensée comme une gamme de compromis. Il ne bénéficie pas des traditionnels labels de qualité, parfois trop chers pour la restauration collective, mais il respecte un cahier des charges très strict. Les poulets sont élevés en soixante-trois jours soit deux fois moins vite qu’un poulet traditionnel ; ils profitent d’un accès à l’extérieur et d’une aire de vie d’au moins 2 m2. Enfin, ils sont nourris sans OGM et ne sont pas l’objet de traitements antibiotiques systématiques.

Quelle est la part du bio dans vos achats ?

Nous entendons la multiplier par trois dans les cinq ans qui viennent. Nos achats de produits bio s’élèvent à 5 M€ par an actuellement. En 2025, nous avons prévu d’atteindre 15 M€ au minimum. Ce dernier objectif chiffré et les deux exemples que je vous ai donnés juste avant illustrent bien notre leitmotiv en matière d’achats alimentaires : « Promouvoir le meilleur, s’interdire le pire et améliorer le reste ».

Sur quels sujets travaillez-vous en matière de « protection de la planète », votre 3e axe RSE ?

Chez un distributeur, les deux principaux postes au titre de l’impact carbone sont le transport et les entrepôts avec les équipements frigorigènes. Le groupe Sysco souhaite atteindre la neutralité carbone à l’échelle mondiale à moyen terme. La trajectoire de réduction de nos émissions de CO2 sera publiée cet été. Sur le chapitre du transport, nous avons déjà pas mal avancé. Quatre -vingt pour cent de nos 800 camions (bi ou tritempératures) sont à la norme Euro 6 ; cela fait plus d’une dizaine d’années que nous travaillons à l’optimisation des tournées et que nous avons investi dans des logiciels pour nous y aider. Enfin, nos chauffeurs sont formés à l’écoconduite et nos camions sont bridés à 85 km/h. Ce sont des mesures que d’autres distributeurs appliquent également. En revanche, nous avons pris il y a quelques années une décision moins courante, en investissant dans des équipements de froid NH3-CO2, gaz beaucoup moins impactant pour le climat.

Olivier Bitoun

Article extrait de Zepros Distributeurs RHD 11 daté Mai 2021

Sysco France : à la fois distributeur et producteur

• 1,3 Md€ de chiffre d’affaires en 2019.

• 3 500 collaborateurs.

• + de 6 000 produits (frais, surgelé et ambiant).

• 70 sites de distribution.

• 3 usines regroupées sous le nom Les Ateliers du Goût, à Pontivy dans le Morbihan (produits carnés), à Offranville en Seine-Maritime (poissons et produits transformés) et à Barbezieux-Saint-Hilaire en Charente (desserts et pâtes).

Olivier Bitoun
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