« Aujourd’hui, notre métier c’est : hôtelier en entreprise "

Oui, mais il n’y a malgré tout pas de quoi crier victoire. J’avoue que cette période a été une expérience très traumatisante et a laissé des traces. Outre l’avenir de l’entreprise, la préservation de l’emploi a hanté nombre de mes journées (et mes nuits). Licencier est dramatique pour un chef d’entreprise. Qui plus est lorsque l’on connaît 80 % de ses salariés. Ce qui est mon cas. Heureusement, nous sommes parvenus à mettre en place un dispositif d’activité partielle de longue durée de deux ans qui nous a permis de garder nos collaborateurs (900) et mieux encore de les former. Une démarche qui s’avère aujourd’hui pertinente au regard de la reprise de notre activité.

Je vais être franc : nous sommes aujourd’hui à plus de 70 % de notre activité d’avant Covid. Un niveau avec lequel nous devons composer. La crise sanitaire a en effet accéléré les changements de comportements et les organisations du travail avec, notamment dans le secteur tertiaire, une montée en puissance du télétravail. Désormais, les mardis et jeudis, nos restaurants affichent quasiment complet. En revanche, cela ne se bouscule pas le lundi. Quant au vendredi, certaines sociétés vont jusqu’à fermer leur siège.
Pour autant, le marché de l’entreprise reste actif. La demande est là. D’ailleurs, en termes de développement commercial, nous avons réalisé une bonne année 2022 avec la signature de 13 nouveaux contrats dans des sites de belle facture : Hermès Lyon, Banque Populaire Rives de Paris, la tour Engie à la Défense, Central Seine, Loxam… Ces nouveaux contrats génèrent quelque 15 M€ de chiffre d’affaires. 

 Absolument ! Je pense que le télétravail constitue une réelle opportunité pour les sociétés de restauration collective. Celle de se réinventer. Son essor contraint les entreprises à trouver un nouveau moyen pour que la pause déjeuner devienne un véritable moment de convivialité partagée. Pour beaucoup de patrons, la cantine d’entreprise, au sens large du terme, constitue ainsi un enjeu capital. Ils nous demandent d’ailleurs de les aider à faire revenir leurs collaborateurs au bureau. 
Dans ce contexte, il ne s’agit plus pour les opérateurs de se planquer derrière les lignes de self. Et d’attendre que le convive vienne à vous. Aujourd’hui plus que jamais, notre métier : c’est hôtelier en entreprise. Cela signifie faire preuve d’hospitalité, savoir animer un espace, offrir une prestation globale au quotidien, et ce de plus en plus souvent du matin au soir. Le tout accompagné d’un sens du service et d’une offre culinaire saine ainsi que variée. 

À la tête d’un groupe indépendant, je n’ai pas de cours de Bourse à soutenir. Cela favorise la créativité et l’agilité. Nous l’étions avant la crise, pendant la crise et nous le sommes aujourd’hui encore. En témoigne le succès de notre concept, Les Tables de Taillevent, créé avec la famille Gardinier. Ce service de restauration premium et de conciergerie très « haute couture » a séduit 7 sociétés. Ces prestations génèrent 8 M€ de chiffre d’affaires. 
En parallèle, nous avons mis au point le concept de Bistrot Factory. Il s’agit d’un véritable restaurant d’entreprise, destiné aux immeubles de moins de 10 000 m2. La production de l’offre chaude à J-1 s’effectue sur Kadence, notre atelier de production dans le 13e arrondissement de Paris. Elle est livrée en liaison froide tous les jours sur les sites tandis que l’offre froide quotidienne est préparée sur place. Cette prestation plaît beaucoup. Nous comptons 7 Bistrot Factory à Paris et 8 à Lyon. Une dizaine de dossiers supplémentaires sont en cours de finalisation sur Paris. 

L’inflation à laquelle nous sommes confrontés, c’est du jamais vu ! Il nous faut aller à la renégociation des contrats. Mais pour beaucoup de clients, le prix n’est pas un problème. L’inflation ne peut être comparée à la pandémie. Car, nous avons des leviers pour agir, ce qui n’était pas le cas avec le Covid et ses confinements.