Sodexo : « En France, il y a un engagement exceptionnel des équipes ! »
Pourriez-vous nous faire un résumé de votre longue carrière chez Sodexo ?
J’appartiens à la famille Sodexo depuis 22 ans. C’est long, et court à la fois, tant j’ai appris et j’ai encore à apprendre. L’aventure a débuté en tant que chef de projet Intranet monde. Rapidement, j’ai évolué vers des postes opérationnels, en restauration d’entreprise, puis chez Sodexo Prestige. Après avoir été directeur des opérations France, je rêvais de partir à l’étranger. Résultat : on m’a confié la direction générale (en 2014) de la Chine durant cinq ans, à Shanghaï. Une expérience unique au cours de laquelle humilité et sens de l’adaptation étaient essentiels. Des éléments importants qui m’ont été utiles quand j’ai pris en 2018 le poste de directeur général Monde du segment Seniors & Handicap, à Washington.
Puis, la crise sanitaire s’est déclarée. Le groupe s’est réorganisé et a créé la région Europe continentale dont j’ai été nommé CEO pour les secteurs Santé, Seniors et Éducation. Et en novembre 2022, on m’a confié les commandes opérationnelles de la France !
Le groupe a simplifié son organisation. Quel impact concret cela a-t-il pour la France ?
Concrètement, l'entière responsabilité de la gestion opérationnelle a été transférée aux pays, regroupés en trois zones géographiques : Amérique du Nord, Europe et reste du monde (Asie-Pacifique, le Moyen-Orient, l’Afrique, le Brésil et l’Amérique latine). De plus, une fonction Croissance et Performance Commerciale a été créée pour accélérer la croissance rentable et maximiser la valeur générée par la segmentation du Groupe. Nous ne fonctionnions pas ainsi auparavant puisque les patrons mondiaux étaient organisés par segments d’activité. Cette nouvelle organisation procure davantage d’autonomie, mais aussi de rapidité dans la prise de décision au niveau local.
Dans ce cadre, j’ai la responsabilité de la gestion opérationnelle en France de six gros segments d’activité (justice, éducation privée et publique, médico-social, hôpitaux, Sodexo live ! FM...), soit 4 000 sites, 30 000 salariés et 3 600 clients. Des clients dont nous sommes aujourd’hui encore plus proches que jamais !
Fort de votre expérience à l’étranger, quel regard portez-vous sur le marché français ?
La France, c’est le berceau du groupe. C’était mon rêve d’y revenir car j’aime mon pays. Ici, il y a un engagement exceptionnel des équipes que l’on ne retrouve pas ailleurs. Aux États-Unis, par exemple, les mentalités sont différentes. On se dit je m’engage, mais qu’est-ce que j’y gagne ? En Chine, les collaborateurs ont la pression des familles… La France est unique en son genre. Il y a énormément de potentiel et je connais tous les atouts de ce pays. Et je dois l’avouer, la restauration collective française est un modèle dans le monde !
Ce modèle peut-il perdurer notamment sur le segment scolaire ?
Avec le choc inflationniste inédit que subit notre secteur depuis plusieurs mois, le scolaire rencontre de nombreux problèmes en particulier au niveau des collectivités territoriales. C’est pourtant le segment le plus avancé par rapport à la loi Egalim… Mais, plus de 20 % d’appels d’offres infructueux à fin mai, c’est du jamais vu ! Alors, oui ce marché devient compliqué pour des acteurs comme nous. Nombre de nos collègues sont en grande difficulté. Avec le SNRC, la profession a alerté les pouvoirs publics de la gravité de la situation à laquelle nous sommes confrontés. Nous avons été reçus, écoutés mais, hélas, pas toujours entendus. Chez Sodexo, on met tout en œuvre pour battre l’inflation car les Écoles et l’enseignement de manière plus large, c’est notre ADN. Nos équipes font preuve d’une combativité exemplaire, en particulier au niveau de l’ingénierie des cuisines. Mais, celle-ci a ses limites !
Aujourd’hui, la profession travaille unie. Nous collaborons notamment avec l’INSEE pour proposer un nouvel index de révision des prix des marchés publics, indispensable pour notre avenir.
Qu’en est-il au niveau de la restauration d’entreprise ?
Le secteur des adultes au travail est le secteur qui a été le plus impacté durant la période du Covid-19. Mais, ce secteur était déjà en pleine mutation auparavant. La crise sanitaire a finalement été un formidable accélérateur des tendances que nous avions par ailleurs envisagées. Nous nous sommes adaptés. Aujourd’hui, le marché se stabilise. À Paris, la fréquentation est de 70 % tandis qu’en Province, elle oscille entre 85 % et 90 %. Pour regagner les 30 % perdus, il faut capter les salariés et les amener à interagir. Comment ? En proposant une offre multicanale qui privilégie bien-être et convivialité. C’est ce que nous faisons avec par exemple : la livraison à domicile, le corner Foodchéri, la nouvelle carte de paiement Toqla, la data, la création de hub sociaux avec gratuité notamment du café… Nous avons aujourd’hui les armes pour faire revenir les collaborateurs au bureau !
Et du côté du marché des seniors ?
C’est un marché, lui aussi, en mutation avec la montée en puissance des baby-boomers. Il va falloir mettre en place une offre qui corresponde davantage à cette génération plus autonome. Nous planchons dessus…
Pour ce qui est des Ehpad, le contexte est différent. Les résidents arrivent plus âgés dans ces établissements et sont moins autonomes. Raison pour laquelle nous avons travaillé sur les problèmes de mastication (observatoire de la dysphagie) et mis au point une nouvelle offre. L’idée générale sur ce segment, c’est de proposer plus de recettes bien être et plaisir.