Jean-Charles Schamberger

[Top 100] « Nous avons un niveau de service très compétitif »

Rémi Thomas
Directeur général - CEO
Sysco France
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Remi THOMAS _ CR Jean-Lionel Dias

Panorama du marché des grossistes distributeurs foodservice - Entretien réalisé le 24 juin.
Zepros Distributeurs RHD 20 Spécial Top 100 - Edition 2024

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Quel bilan tirez-vous de l’année écoulée ?
Rémi Thomas

Globalement, nous sommes satisfaits de notre année. Celle-ci a été découpée en deux périodes. Il y a eu un « avant-France/Afrique du Sud » et un « après-France/Afrique du Sud » de façon très marquée. Ce n’est pas uniquement une question de rugby et de Coupe du monde, il y a eu bien sûr d’autres éléments, mais il y a eu clairement une bascule. Le premier semestre a été porteur en volume et en valeur. Le deuxième a été beaucoup plus challengé. Nos clients ont eu à la fois moins de trafic et un trafic plus frugal du fait de certains arbitrages de la part de leurs convives. À cela s’ajoutaient certaines réalités de gestion : main-d’œuvre, remboursements de prêts, etc. Nos clients sont particulièrement mis à l’épreuve depuis octobre et nous avons dû nous adapter. Et aussi nous assurer d’être bien meilleurs dans notre capacité à les accompagner dans ce type de situation.

 

Comment avez-vous procédé ?
Rémi Thomas

Cela passe d’abord par une meilleure disponibilité des produits. Les retours clients sur notre niveau de service sont très positifs. Tous saluent de gros progrès réalisés depuis six à neuf mois. Aujourd’hui, nous avons un niveau de service très compétitif. 
Cela passe également par la qualité de nos équipes. Nous faisons évoluer ces dernières vers un rôle qui va de plus en plus sur le conseil afin de mieux appréhender la réalité de nos clients. Pas seulement pour comprendre leurs besoins produits ou la commande du jour, mais bien comprendre leur métier, leurs enjeux sociaux, leur positionnement, afin d’apporter des propositions pour les aider à affiner ce positionnement. Et puis, dans un contexte très compliqué, il s’agit d’offrir encore plus de valeur grâce à un meilleur ratio qualité-prix et des produits toujours plus appropriés.
 

Avez-vous élargi vos gammes ?
Rémi Thomas

Absolument. Il y a un gros travail qui a été effectué dans le cadre de la réflexion stratégique. Nous avons la chance d’avoir un historique et un savoir-faire très fort en matière de surgelés. Depuis déjà plusieurs années, bien avant mon arrivée, les équipes ont aussi compris que les clients avaient besoin d’une offre beaucoup plus large, et ce, dans toutes les températures. Nous sommes par exemple le deuxième distributeur foodservice de viande fraîche ! Cet élargissement a été étendu à l’épicerie, la crèmerie, mais également au non-alimentaire. Ce sont au moins 200 références qui ont été ajoutées durant l’année écoulée.

Ce travail s’est fait en parallèle d’une valorisation de nos points de force. Rappelons que ce qui nous différencie de nos concurrents, c’est que nous sommes aussi producteurs. C’est une chose qui m’est chère, puisque je viens de l’industrie. J’ai la chance d’avoir une ligne hiérarchique totalement alignée sur le sujet : cela rentre pleinement dans la stratégie de Sysco aujourd’hui, afin d’avoir des produits supérieurs et différenciants.
Nous avons confirmé la semaine dernière les investissements important que nous ferons au sein de nos ateliers : Offranville, Noyal-Pontivy et Barbezieux-Saint-Hilaire.

Une autre chose qui nous anime fortement, ce sont les marques. Sysco est très exigeant concernant le développement de ses gammes en termes de qualité, régularité et positionnement prix. Chaque produit fait l’objet d’un suivi particulier durant toute sa commercialisation. Que ce soit en restauration commerciale ou collective, nous avons des marques différenciantes pour mieux répondre aux attentes de nos clients (Terre&Mer, Création Brigade, Collectif du Goût, Sysco Classic…). Nous avons aussi la grande fierté d’être le distributeur exclusif des glaces Nestlé : La Laitière, Nestlé, Mövenpick, Nuii…
 

Comment vos marchés se sont-ils comportés ?
Rémi Thomas

Nous avons enregistré un développement assez homogène, tant auprès des indépendants que des grands comptes, tout aussi bien en restauration commerciale que collective. Nous avons, par ailleurs, fait des choix : il y a des clients que nous n’accompagnons plus avec la même volumétrie. Nous ne sommes absolument pas dans une quête du volume à tout prix. Nous sommes plutôt dans un schéma qui prône la valorisation à tous les niveaux et la bonne gestion de nos entreprises.
Nous sommes contents d’avoir dans notre portefeuille l’ensemble des métiers de bouche, toutefois, dans le cadre de notre plan d’action 2024 et pour les années à venir, nous sommes particulièrement concentrés sur la restauration commerciale et collective. Par rapport à d’autres acteurs, nous nous sommes moins focalisés sur les circuits de vente alternatifs tels que les bouchers-charcutiers-traiteurs ou les pâtissiers.
 

Quel bilan tirez-vous de la 1re édition du prix du Meilleur Sandwich de France ?
Rémi Thomas

Même si notre cœur de cible est la restauration avec service à table, nous sommes convaincus qu’il existe de vrais points de cohérence, en termes de gammes, entre les besoins d’un boulanger, d’un opérateur du snacking et d’un restaurateur. Nous avons donc co-imaginé, avec la Confédération nationale de la boulangerie-pâtisserie française, ce premier concours. Le retour est très positif. C’était un très bel événement, tant dans la préparation en amont que lors de la compétition. À nous de continuer d’accompagner ces jeunes qui ont montré beaucoup de dynamisme et d’engagement, afin de valoriser leur travail. Nous avons prévu des plans de communication qui vont perdurer. Le contact a été excellent avec la Confédération à tous les niveaux. Nous allons désormais dresser le bilan ensemble et voir comment nous faisons évoluer cette compétition.
 

Vers quoi s’oriente la demande de vos clients ?
Rémi Thomas

Nous sommes toujours dans un univers de paradoxes, avec des demandes et leurs contraires. Par exemple, à la fois des produits locaux et des produits de cuisines du monde ; des produits bruts et en même temps un besoin de produits service pour répondre à des enjeux de personnels ; et bien sûr, des demandes différentes entre restauration commerciale et restauration collective. 
Mais peu importe la typologie de clients, nous devons pouvoir leur répondre. Il y a un vrai enjeu d’adaptation, de vigilance, de souplesse et d’écoute du marché. Nous sommes en perpétuel développement. Certains produits demandent du temps pour être développés en termes de R&D. Il y a quelques mois, nous avons lancé pour les collectivités un burger 100 % français, 100 % clean, qui a nécessité plus de deux ans de travail. Nous renforçons d’ailleurs notre Comité de développement produit en rajoutant des ressources humaines et financières. 
 

Quelles sont vos ambitions en termes d’innovations ?
Rémi Thomas

Nous avons présenté à toute l’entreprise un plan stratégique à horizon 2027 visant à doubler le nombre d’innovations issues de nos ateliers. Le premier axe de notre plan stratégique, c’est de répondre aux besoins des clients et, finalement, c’est cette pluralité d’attentes qui nous amène à avoir une approche très large. 
Ce plan représente globalement 200 M€ d’investissements sur trois ans. Outre une grande partie production, il intègre un renouvellement complet de notre flotte de véhicules et aussi des améliorations au niveau des systèmes d’information. Ce plan stratégique comporte trois axes. 1- Répondre aux attentes de nos clients. 2- Être encore meilleur dans notre exécution au quotidien. 3- Accompagner la réussite de nos collaborateurs. 
 

La situation reste-t-elle tendue en matière de ressources humaines ?
Rémi Thomas

Aujourd’hui, la question des talents demeure au cœur de toutes les discussions. Au national, ce sont les postes de maintenance qui sont les plus recherchés. Il y a quelques bassins sur lesquels nous avons des enjeux forts, sur des postes de préparateurs, même si aujourd’hui nous avons moins de soucis. Globalement, nous sommes salués pour le travail qui a été fait pour garder nos équipes engagées.

À quoi cela tient-il ?
Rémi Thomas

J’insiste beaucoup sur le management. Pour moi, le manager est la personne qui peut faire une grosse différence. Nous aidons bien sûr nos équipes à travailler dans les meilleures conditions, mais lorsque l’on a des managers qui ont valeur d’exemples, qui donnent du sens, qui sont humains, cela pèse pour beaucoup.

Quels sont les autres dossiers qui vous occupent ?
Rémi Thomas

Nous restons mobilisés sur l’avancée du digital qui est un axe majeur de progrès. Le site d’e-commerce est pour nous un outil complémentaire des chefs de secteur et des télévendeurs. Beaucoup d’efforts sont réalisés en matière de simplification d’utilisation et en termes de fonctionnalité. Si un produit est indisponible, le site propose en 2 secondes, via l’intelligence artificielle, un produit de substitution équivalent. Avec également une dimension prix, en offrant 100 € de remise tous les 3 000 € d’achats.
Nous travaillons également sur l’uniformisation de la façon de travailler avec la standardisation de nos modes opératoires.
Enfin, depuis octobre, nous avons mis en place une nouvelle organisation afin de remettre notre plus bas niveau de décision au plus près du client. Nous avons mis en place 6 régions en France avec 6 directeurs qui ont la responsabilité, à la fois, des structures commerciales et logistiques. Cela leur permet d’avoir une proximité et une capacité de réactivité beaucoup plus fortes pour apporter des réponses, sans avoir besoin de reporter à plusieurs niveaux hiérarchiques. Il y a un impact évident, on sent qu’il y a une proximité qui change, tant avec les équipes qu’avec les clients.

 

Jean-Charles Schamberger
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