[Spécial RSE] Les distributeurs au rendez-vous de l’index d’égalité homme-femme

Olivier Bitoun
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Préparatrice de commandes chez Sapam

Depuis le 1er mars, les entreprises de plus de 50 salariés sont désormais tenues de calculer et de publier leur index d’égalité professionnelle entre hommes et femmes. Bon nombre de distributeurs de la RHF découvrent cet indicateur RSE destiné à orienter leur politique de mixité.

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Les responsables ressources humaines des distributeurs se sont parfois arraché les cheveux pour calculer, avant le 1er mars, l’index égalité de leur entreprise. Surtout que la plupart se pliaient à l’exercice pour la première fois ! Cet index – une note sur 100 – est censé traduire la façon dont les femmes et les hommes sont traités sur les sujets de la rémunération et de la carrière (cf. encadré).

L’intention est louable. Mais une note est réductrice ; les écoliers le savent bien ! C’est encore plus vrai chez les distributeurs où plusieurs métiers traditionnellement occupés par des hommes rendent le calcul de l’index problématique. Les professionnels constatent chaque jour que les métiers de préparateurs de commandes et surtout de chauffeurs-livreurs sont majoritairement exercés par des hommes et les postes de télévente plutôt par des femmes. Si le rapport s’équilibre davantage chez les commerciaux, au global la parité est encore loin ! Dans les PME, certains des indicateurs qui composent l’index sont impossibles à établir. « Dans la catégorie des femmes cadres, je ne peux calculer l’index que pour une seule tranche d’âge ; pour les autres, il n’y a pas assez de salariés puisqu’il en faut au moins 3 dans chaque catégorie. Et encore, nous sommes 170 personnes ! », explique Maryse Trioux, directrice ressources humaines de Sapam (29e de notre Top 100). À ces soucis méthodologiques s’ajoutent des biais. Le chapitre des hausses de salaire abrite des aberrations. « On peut être amené à augmenter une femme à son retour de congé de maternité, uniquement parce que son collègue masculin l’a été en son absence », pointe Jean Tavernier, le responsable RSE de France Frais. Autre défaut du modèle : « Si les femmes sont sous-représentées dans le top 10 des rémunérations chez nous, c’est juste la conséquence de l’ancienneté dans l’entreprise », pointe la DRH de Sapam. Dans les PME aux effectifs réduits, le départ d’une salariée suffit à faire basculer un indicateur…

 

Des distributeurs RHF bons élèves

Le calcul de l’index au-delà du fait qu’il est obligatoire, a-t-il du sens ? « Oui ! », répondent les distributeurs, car « il nous fait nous pencher sur le sujet de l’égalité », déclare Stéphanie Bonnal, la coordinatrice RH et paie de Forezia Snacking (58e de notre Top 100). Pour les dirigeants, c’est l’occasion de découvrir des différences de traitement dont ils n’avaient pas conscience. Si la défense de l’égalité homme-femme va dans le sens de la RSE, ce n’est pas son seul atout. C’en est un aussi pour la marque employeur. Les distributeurs de la RHD auraient intérêt à communiquer sur leur index puisque France Frais a un bon 84/100 en 2020 en moyenne, en progression de 2 points par rapport à 2019 ; Cafés Richard décroche une très bonne note avec 89 (+ 3 points vs 2019). Même résultat – 89 – pour Sapam. Forezia Snacking affiche, quant à lui, un encourageant 79 en 2020, comme en 2019.

Au-delà de l’index, qui sert de révélateur, « la défense de l’égalité homme-femme favorise la performance économique », assure Dominique Crochu, cofondatrice de la société Mixity, dont l’outil Mixity Gender effectue un scan à 360° de la politique de genre d’une entreprise. Pour confirmer ses dires, elle s’appuie sur l’étude du cabinet McKinsey, laquelle établissait en 2019 que les entreprises qui favorisent la mixité de genre dopent leur performance économique de 25 %.

Ranger les stéréotypes au placard

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Si l’égalité est le cap à suivre, encore faut-il savoir quelles actions lancer pour y parvenir. Faut-il aller jusqu’à la discrimination positive ? Non, répond Anne Richard Bellanger, directrice générale de Cafés Richard. « Vouloir une stricte mixité n'a pas de sens mais nous veillons à la faire progresser selon les différents métiers. » C’est une femme à la tête d’une entreprise de 450 salariés qui le dit ! Les distributeurs ont des idées pour faire bouger les lignes. La question se joue d’abord sur les recrutements. Cafés Richard emploie plus de femmes qu’avant. En 2020, elles ont représenté 37 % des CDI quand elles ne sont que 27 % des effectifs de l’entreprise. Un progrès. Entreprises et candidats à l’embauche doivent aussi ranger les stéréotypes au placard. « C’est notre rôle d’employeur d’inciter les deux sexes à se porter candidats à des postes pour lesquels ils ne se sentent pas légitimes », affirme Anne Bellanger. Les hommes, par exemple, doivent s’imaginer plus souvent en télévendeurs. Jean Tavernier ajoute : « Nous devons être prêts à recruter des femmes comme préparatrices de commandes voire comme chauffeurs. » Sapam a adapté un poste de travail afin qu’il devienne accessible à une femme. « En 2017, nous avons recruté une préparatrice de commandes. Pour rendre son métier moins pénible, on oriente vers elle les commandes de la restauration commerciale car les charges à soulever sont moins lourdes », explique Maryse Trioux.

L’autre clé est celle des carrières et des rémunérations. « Depuis que nous calculons l’index, nous suivons l’évolution salariale des hommes et des femmes pour les temps pleins et les temps partiels ; nous recensons les promotions et les évolutions de salaire en nombre de personnes et en pourcentage. Enfin, nous regardons quelles réponses sont données aux demandes des salariés d’aménagement de leurs conditions de travail (temps partiel, retour à plein-temps, télétravail…) », détaille Stéphanie Bonnal. La cause avance.

Olivier Bitoun

Article extrait de Zepros Distributeurs RHD 11 daté Mai 2021

L’index d’égalité professionnelle : un nouvel indicateur RSE

• Que calcule-t-il ?

C’est une note sur 100, calculée chaque année à partir de 4 indicateurs :

-L’écart de rémunération entre femmes et hommes dans l’entreprise (compte pour 40).

-L’écart du taux d’augmentation individuel entre hommes et femmes (compte pour 35).

-Le pourcentage de salariées ayant bénéficié d’une augmentation dans l’année suivant leur retour de congé de maternité (compte pour 15).

-Le nombre de salariés du sexe sous-représenté parmi les 10 plus hautes rémunérations de l’entreprise (compte pour 10).

• Où le calcule-t-on ?

Sur le site index-egapro.travail.gouv.fr.

• Quelle note faut-il obtenir ?

Au moins 75/100.

• Les entreprises risquent-elles des sanctions ?

Non. Si leur index n’atteint pas 75, elles ont trois ans pour mettre en œuvre des mesures correctives. Passé ce délai, elles peuvent encourir des pénalités si elles n’ont rien fait.

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Olivier Bitoun
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