[Top Indépendants 2021] 3 questions à Christian Têtedoie
Le grand chef lyonnais est aussi un entrepreneur passionné à la tête de onze restaurants et d’un groupe qui a réalisé en 2019 près de 12 M€ de chiffre d’affaires (-54% en 2020). Multi casquette Christian Têtedoie s’investit également au niveau de la formation avec l’ouverture en 2022 de son centre de formation d’apprentis.
Vous êtes associé dans la gamme de vaisselle et de cuisson innovante, Ô Cinq Sens présentée au dernier Sirha. En quoi l’innovation et ce type de partenariat est important pour un chef entrepreneur ?
Si on veut continuer à faire de la belle cuisine nous devons trouver des solutions efficaces à côté pour palier le fait que nos restaurants gastronomiques ne nous rapportent rien du tout. J’ai évidemment le plaisir d’avoir aussi des établissements qui font heureusement du résultat mais sur le gastronomique ce n’est pas le cas. C’est de l’image et cela nous passionne d’ailleurs. Si nous voulons de bonnes conditions de travail pour nos équipes, des restaurants qui soient jolis pour nos clients avec de beaux produits pour les régaler, l’exercice est quasi impossible. Pour ce qui est d’Ô Cinq Sens, la cuisson se fait sur table avec un produit frais, le client est acteur de son repas, il voit la qualité du produit, il le cuit à la minute et le déguste. Cela répond à la fois à un problème récurrent de manque de personnel en restauration et à une exigence de qualité, d’accessibilité en termes de prix et de naturalité.
Quelle est votre vision de l’entrepreneuriat en restauration ?
Sur chaque restaurant j’ai un associé . J’ai l’amour des produits et des clients, j’aime créer des entreprises mais je ne suis pas un gestionnaire, c’est une catastrophe, je trouve les chiffres indigestes au possible (sourire) ! Par conséquent, faut aller chercher les compétences là où elles sont. Je pense avoir le talent de savoir m’entourer, de savoir remercier mes collaborateurs qui me le rendent mille fois. Les chefs ont tendance à devenir assez égocentriques, alors qu’il faut s’ouvrir, nous avons tous tant à apprendre les uns des autres.
Vous portez aussi le projet d'un centre de formation des apprentis de la gastronomie (CFAG) dont l’ouverture est prévue en septembre 2022 au château de Lacroix Laval, à Marcy-l’Étoile, près de Lyon. Pourquoi cette nouvelle aventure ?
Je milite depuis un moment pour la formation et j’aime mettre des actes en face de mes convictions. Je voyais les choses dériver, j’avais beaucoup de personnes qui travaillaient chez moi comme apprenti et qui revenaient de l’école sans avoir envie d’y retourner, qui s’y ennuyaient… Il est temps que les professionnels qui ont été écartés assez violemment il y a 30 ans des réunions officielles sur le sujet se fassent entendre. Je veux créer un nouveau courant pour que les professionnels se réapproprient la formation et que l’on retrouve des cuisiniers qui restent dans leur cuisine et des jeunes passionnés dans nos maisons.
Propos recueillis par Chloé Labiche