[Top 100] Christophe Behague : « La visibilité sur l’activité reste encore faible »

Jean Charles Schamberger
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Christophe Behague

Entretien avec Christophe Behague, directeur général de QSR Logistics. Réalisé le 21 juin.

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Quel bilan économique tirez-vous de cette année écoulée ?

Nous terminons l’année sur un CA de 320 M€, soit moins 18 %. Avec notre coactionnaire Stef, nous opérons toujours via 8 entrepôts même si la structure a un peu changé – 6 pour Burger King et 2 pour Quick, contre respectivement 5 et 3 l’an dernier – en raison de la transformation de restaurants Quick en Burger King. Le nombre d’unités Quick a été optimisé pour suivre l’évolution du nombre de restaurants – région parisienne et à proximité de Marseille, c’est-à-dire près de ses bassins de consommation. Côté Burger King, nous venons d’ouvrir un entrepôt à Canéjan, près de Bordeaux, pour couvrir tout le Sud-Ouest. Au total, nous livrons 520 restaurants, soit 400 Burger King et 120 Quick.

Le bilan 2020, quant à lui, est une succession de phases compliquées, avec huit semaines d’arrêt total lors de la première vague, comme tout le monde. À partir de mai, nous avions vécu une remise en route partielle au gré des autorisations et bien sûr de l’approvisionnement des éléments indispensables de protection pour les équipes et les consommateurs. L’été 2020 est passé et depuis nous avons vécu au rythme des autorisations, des couvre-feux, des confinements qui ont à chaque fois impliqué de s’adapter aux contraintes des restaurants. Il s’agissait donc de transformations et d’adaptations permanentes et nous avons continué à tourner afin d’approvisionner des réseaux qui permettaient de maintenir une offre pour les personnes devant être à l’extérieur de chez eux. Avec l’émergence de nouveaux canaux, des changements structurels de comportements des consommateurs se sont renforcés avec, par exemple, le click & collect et la livraison à domicile.

Comment se déroule cette reprise ?

Les questions de ces dernières semaines sont : « Que va-t-il se passer ? Va-t-on vers un retour aux comportements antérieurs ? Va-t-on vers un mix de modes de consommation ? » C’est très fluctuant, car personne ne sait quel sera l’impact durable de cette crise sur les consommateurs. La visibilité reste assez faible, c’est pourquoi nous augmentons les couvertures de stocks pour faire face aux variations qui demeurent très fortes d’une semaine à l’autre. Notre rôle, c’est de répondre aux besoins des restaurants et faire en sorte qu’ils ne manquent de rien.

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Christophe Behague
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Y a-t-il des tensions sur certains produits ?

Si l’on prend un peu de recul, on s’aperçoit que ce n’est pas uniquement la restauration que l’on remet en route. C’est l’industrie agroalimentaire dans sa globalité qui redémarre avec, là aussi, certaines difficultés liées aux changements brusques de mode de vente. Par exemple, l’explosion de la VAE dans tous les secteurs de vente provoque de fortes tensions sur les sacs de VAE. Sur les produits primaires, la « supply chain » est à la fois robuste et réactive avec les partenaires fournisseurs. Fondamentalement, la masse de l’agroalimentaire français n’a pas changé. Ce qui a changé, ce sont les canaux de distribution. Tout le monde a besoin de se réadapter, de mettre les bons produits dans les bons canaux, dans les bons conditionnements.

Rencontrez-vous des tensions au niveau des effectifs ?

En tant que 4PL*, notre équipe compte 42 personnes et nous n’avons jamais arrêté. Ce n’est pas parce que les restaurants commandent un peu moins qu’il ne faut pas organiser les appros et les tournées de distribution, donc notre effectif n’a pratiquement pas bougé. En revanche, nous avons beaucoup développé le télétravail – et ce, dès le mouvement des Gilets jaunes d’ailleurs –, car je n’avais qu’une hantise, c’était de devenir un cluster et de ne pas pouvoir continuer à servir nos clients. Notre partenaire 3PL**, le groupe Stef, a dû beaucoup plus ajuster ses effectifs de préparateurs de commandes et de conducteurs via le recours à l’activité partielle. La remontée en puissance est progressive : il faut faire revenir les salariés à temps complet au travail et reformer des équipes.

Sur quels dossiers travaillez-vous ?

Nous savons que la croissance du réseau Burger King va redémarrer. Le programme d’ouvertures – ralenti – a déjà repris. Notre premier objectif est donc d’accompagner le développement de notre client pour le second semestre et pour l’année prochaine. C’est pour cela que notre partenaire Stef a ouvert un nouvel entrepôt sur Bordeaux en juin.

Il faut également travailler sur l’amélioration des prévisions de vente. C’est-à-dire bien comprendre, avec l’enseigne, et mieux anticiper les comportements des consommateurs. Il faut être le plus réactif possible et pour cela avoir l’information dès le départ, presque en temps réel, de la part des deux réseaux avec lesquels nous avons de bons échanges. Enfin, nous allons essayer de gagner en sérénité. Nous n’avons pas arrêté depuis seize mois, donc il faut tout restabiliser avec des process très linéaires, qui marchent bien, tout en travaillant en permanence l’amélioration des performances service client. Côté logistique, Stef a testé les livraisons avec un camion électrique sur la région de Lyon, et fonctionne au biodiesel à Rennes. Il faudra ainsi intégrer toutes les contraintes des ZFE sur plusieurs villes et puis, bien sûr, Paris 2024.

Quels enseignements tirez-vous de cette crise ?

Il faut juste se préparer pour la prochaine ! Car, malheureusement, je pense que ce n’est pas la dernière. Il faut rester vigilant sur le sujet. Nous avons aussi appris à travailler de manière différente et finalement plus efficacement avec des échanges constants avec nos donneurs d’ordres et les acteurs logistiques. Nous avons vraiment renforcé la solidarité entre les équipes, car nous avons fait face ensemble à cette situation. Enfin, côté clients, ce réseau de restauration rapide a montré qu’il était résilient à travers son « système » fort de fournisseurs, sa réactivité et sa capacité à faire de la vente à emporter et de la livraison.

*4PL : Gestion, par QSR Logistics, des achats opérationnels, approvisionnements, stocks jusqu’à la facturation des restaurants.

**3PL : activité logistique et distribution gérée par la BU RHD de Groupe Stef, pilotée par le 4PL QSR Logistics.

Propos recueillis par Jean-Charles Schamberger
Lire et/ou télécharger Zepros Métiers Distributeurs RHD 12 - Juillet-Août 2021

Jean Charles Schamberger
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