[Top 100] P. Bouleau : « La stratégie est bonne et nous sommes sur des axes porteurs »
Entretien avec... Pierric Bouleau, directeur général de Groupe Creno, et Franck Andrieux, directeur commercial et marketing.
STRATÉGIE
Comment s’est déroulé l’exercice 2018 ?
Pierric Bouleau : L’environnement économique n’a pas été très porteur de façon générale. Les conditions météo ont impacté tant la consommation de produits alimentaires que le monde de la production, les mouvements sociaux touchent plus ou moins fortement des secteurs de distribution, la consommation des fruits et légumes est en baisse (volume).
Cette année 2018 ressemble aux deux, trois dernières années où le contexte n’était pas non plus très euphorique. Néanmoins pour Creno, nous tirons un bilan positif à mi-parcours de notre projet stratégique engagé en 2017. Celui-ci met en avant la capacité de nos affiliés à être des acteurs forts de la distribution des produits frais sur leur territoire.
La stratégie est bonne. Nous sommes sur des axes porteurs si l’on considère les évolutions structurelles de nos métiers et de notre société : produits locaux, fruits et légumes frais, santé-nutrition, naturalité et gastronomie. Les tendances du « mieux consommer », de traçabilité et de transparence, de produits locaux et de leur valorisation gustative, tout cela nous va bien.
Que s’est-il passé au niveau du Réseau Creno?
P.B. : Nous accentuons le développement territorial et nous sommes en phase de renforcement de notre couverture géographique avec les trois affiliés qui ont intégré l’an dernier le réseau (Normandie Fruits, Roussy & Fils, Marco). Fin 2018, la société Balicco a acquis l’entreprise Gadea à Nîmes, concrétisé au 1er juin 2019. En février, l’ouverture du nouveau Min de Nantes s’est réalisée avec la réimplantation de notre affilié Ame Haslé au cœur de ce nouveau marché au travers de sa structure Nantes Frais. Et, parmi les projets, nous attendons avec impatience l’ouverture du nouveau Min de Caen dans lequel notre affilié Normandie Fruits se réimplantera à la rentrée 2020. Actuellement, nous sommes en train de renforcer la couverture régionale sur toute la zone Aquitaine. Les actions en cours doivent se concrétiser sur le second semestre 2019. Nous poursuivons aussi nos recherches sur la Lorraine qui est l’autre zone sur laquelle nous avons besoin de densifier notre distribution de produits frais.
Ajoutons également que nous vivons une très belle gouvernance opérationnelle avec nos 12 affiliés membres du Comexo. C’est une belle communauté d’une quinzaine de dirigeants qui prennent les décisions, qui orientent les sujets et qui sont actifs dans la vie quotidienne des différents groupes de travail dans lesquels ils sont engagés. Nous allons dans la bonne direction.
Franck Andrieux : Nous sommes trois désormais pour accentuer encore la proximité auprès de nos affiliés. Nous allons régulièrement chez ces derniers pour les accompagner dans le développement de leurs propres activités, les soutenir dans les actions menées pour renforcer le niveau d’exécution et nous assurer que tout est bien déployé afin d’organiser et améliorer ensemble le service auprès de nos clients.
P.B. : Nous avons eu aussi besoin de mieux comprendre et de mieux intégrer dans notre organisation les attentes, les besoins et les évolutions de nos clients grands comptes. Au sein de la direction Qualité Groupe, nous avons ainsi créé un poste de responsable de la relation client et organisation, confié à Éric Fricker dont le parcours a été entièrement réalisé chez des acteurs de la restauration collective. Son regard nous apporte une meilleure lecture sur les réponses à apporter en termes d’offre produits, de services et d’organisation.Notre nouveau système de management est une démarche très terrain, orientée client. Il est organisé aujourd’hui autour de 3 pôles de compétences : réglementation, certification, et organisation des sites/relations clients. Nous sommes sur une belle dynamique qui porte déjà ses premiers fruits avec l’obtention d’un Certificat ISO 9001 version 2015, tous produits frais en juin 2019.
Qu’en est-il du déploiement de la place de marché ?P.B. : Nous avons poursuivi les projets de digitalisation de nos métiers. De nombreux outils sont mis en œuvre, dont la place de marché lancée en janvier 2018. Nous travaillons actuellement avec les acheteurs de nos affiliés sur une évolution de cet outil. La tendance d’activité se situe aujourd’hui entre 10 et 13 M€ d’achats avec un objectif de 30 M€ à trois ans.Cet outil interactif est vraiment adapté, d’une part aux besoins de nos affiliés dans cette recherche de performance à l’achat et de sourcing amont, d’autre part aux besoins des grands comptes. Quant à nos fournisseurs, ils s’y retrouvent parfaitement en termes de crédibilité-engagement. Et cela deviendra demain une application mobile.
Quelles sont vos autres réflexions ?P.B. : Nous renforçons notre politique de marques du réseau. Nous avons ainsi lancé une marque réseau sur la partie bio : é’O’ Bio ! qui traduit ce positionnement de produits bio français locaux. Et nous lancerons début 2020 une marque ancrée sur le développement durable de filières, intégrant certes des engagements sur l’environnement mais également sur nos responsabilités sociétales et sociales. La marque reste un élément fort de différenciation pour nous.Nous développons aussi toutes les synergies possibles à mettre en place en termes de distribution logistique au travers de la force du réseau et de ses affiliés, au profit de nos clients quelle que soit la taille d’établissement.
F.A. : Nous essayons de mettre de l’intelligence dans la logistique pour répondre aux attentes et aux besoins de nos clients. Apporter à certains une solution qui permet de tout massifier dans une seule livraison est quelquefois une réponse pertinente et utile.Par exemple aujourd’hui, pour certains établissements de clients nationaux qui n’ont pas la capacité de recevoir trois camions en trois livraisons, nos affiliés préparent et allotissent l’ensemble des commandes de fruits et légumes qui seront ensuite livrées chez nos clients via la flotte logistique de Transgourmet Opérations. Les synergies et optimisations ainsi mises en place permettent d’apporter le côté « spécialiste des produits frais » des entreprises du réseau Creno, à la force logistique d’un « distributeur généraliste tri-températures ».Nous nous inscrivons ainsi dans le concept du « One Stop Delivery » de Transgourmet Opérations qui permet d’apporter une solution tout en un, tant à des grands comptes qu’à des clients indépendants, toute France.Propos recueillis par Jean-Charles Schamberger
NICHE PRODUIT
Trois affiliés du réseau Creno (Ame Haslé en Bretagne, Distrimalo et Nantes FraisTransgourmet Seafood à Paris, Balicco dans le Sud-Est) commencent à déployer la filière du poisson ikejime, c’est-à-dire issu de la technique d’abattage ancestrale japonaise qui consiste à neutraliser le système nerveux des poissons avant de les saigner. Au travers de cet abattage, nous sommes dans une démarche de « respect de l’animal » par une mise à mort rapide ! Mais également la filière ikejime est une démarche « écoresponsable » par une pêche sélective de grosses pièces, choisies à la demande des clients et des pêcheurs qui veulent faire évoluer leur métier. Elle s’applique à certains poissons et crustacés sauvages (bar, rouget, turbot, barbue, seiche, homard, lieu, etc.), ramenés vivants au port, puis abattus individuellement à la demande des clients selon leurs besoins. Résultat : une chair qui peut maturer et être conservée jusqu’à douze jours, voire dix-huit, en chambres froides avant d’être travaillée. « C’est une solution très gustative, porteuse de sens et de savoir-faire. Les chefs découvrent de nouvelles saveurs, et un nouvel univers gastronomique à explorer. Certains sont véritablement bluffés ! », commente Pierric Bouleau. Creno peut proposer soit du poisson vivant, soit du poisson ikejime entier, soit des filets de poisson ikejime. C’est un marché de niche qui s’adresse à la restauration gastronomique, mais c’est aussi un élément de différenciation et de valeur ajoutée.