[Top 100] Pascal Peltier : « Je crois au rebond et à la capacité d’adaptation de la restauration »

Jean Charles Schamberger
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Pascal Peltier

Entretien avec Pascal Peltier, directeur général de Metro France. Réalisé le 11 juin

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Quel bilan économique faites-vous après bientôt dix-huit mois de crise ?

Notre exercice fiscal, qui couvre la période octobre 2019-septembre 2020, enregistre un recul de 15 %. Notre année calendaire, quant à elle, affiche une baisse de 20 % à 3,440 Md€. Toutefois, notre modèle omnicanal est unique car il répartit les risques et offre davantage d’alternatives à nos clients. La forte croissance de 2019 était liée à l’essor de la livraison ; en 2020, nous résistons mieux que nos confrères car les Halles Metro étaient très attractives pour les restaurateurs et métiers de bouche qui ont continué à travailler : nous étions les seuls à être ouverts à 100 % et à proposer 100 % de l’assortiment, avec des équipes pour accueillir ceux qui voulaient faire de la livraison et de la vente à emporter, deux activités particulièrement erratiques qui nécessitaient de fonctionner en flux tendus.

Nous avons enregistré un afflux de clients que nous ne voyions pas souvent et qui sont revenus chez nous, car certains de nos confrères étaient fermés. Ils ont redécouvert notre offre ainsi que le fait que Metro est un acteur crédible en matière de livraison avec 50 000 références disponibles en permanence, sans compter l’assortiment sur Metro.fr et notre Marketplace (à eux deux plus de 150 000 références supplémentaires).

Quels enseignements tirez-vous de cette crise ?

L’enseignement majeur réside dans les liens renforcés avec nos équipes, nos clients, nos fournisseurs. Nous avons été très proches de nos collaborateurs, avec certes une activité partielle mais avec des rotations toutes les deux semaines ou toutes les semaines, voire tous les jours. Quotidiennement, nous étions là pour écouter, inspirer, conseiller, accompagner les clients qui venaient nous voir, que leurs établissements soient ouverts ou fermés, notamment ceux qui se sont mis à la livraison et à la VAE. Enfin, nous avons privilégié les petits producteurs, les PME, les TPE qui étaient très interdépendants du hors domicile. Nous avons pu aller les visiter dans toutes les régions. Globalement, cela a été une période forcément douloureuse et je rends hommage à nos équipes car nous l’avons mise à profit pour en sortir plus forts.

Nous avons approfondi un certain nombre de sujets et nous avons anticipé. Nous étions d’ailleurs prêts pour la réouverture des terrasses dès la mi-avril… mais il a fallu attendre le 19 mai !

Comment se déroule la reprise depuis le 19 mai ?

Cela se passe très bien, pour plusieurs raisons. Les équipes sont ravies de retrouver les clients. Nous avons beaucoup de flux en entrepôts avec un nombre d’achetants qui est supérieur, et nous avons un panier moyen qui a explosé dans le cadre de la préparation de la réouverture.

Nous avons réalisé de très bons chiffres avec tout ce qui concerne la terrasse, le matériel, le petit matériel et les arts de la table : depuis deux mois, nous enregistrons un CA en progression de  40 % par rapport à 2019 sur le non-alimentaire. Ensuite, en alimentaire, c’est le sec, puis le frais, et enfin l’extrafrais qui ont explosé. Quant à la préparation de la réouverture des salles, la tendance était identique mais dans un ordre différent : sec, extrafrais et matériel. C’est une grosse reprise avec des chiffres supérieurs à nos attentes sur le non-alimentaire.

Le moment de vérité sera-t-il septembre ?

Je ne crois pas à une vague de fermetures dans la restauration à la rentrée de septembre. Le gouvernement a bien fait les choses. Une bonne partie de nos clients ont pu survivre grâce aux aides et certains ont pu même réinvestir. Enfin, on peut certainement s’attendre à une très belle saison.

Aujourd’hui, l’enjeu se situe davantage dans le nombre de personnes présentes dans les équipes, avec les difficultés de recrutement que l’on connaît. Et pour Paris, la question se pose, avec l’absence des touristes étrangers non européens et plus particulièrement asiatiques et américains, l’inconnue de l’effet du télétravail, et les différences entre quartiers.

Allez-vous mettre en place une offre spécifique pour la rentrée ?

Cette année est très importante puisque Metro France fête ses 50  ans ! Le 8 juin 1971, le groupe ouvrait son premier entrepôt français entièrement réservé aux indépendants à Villeneuve-la-Garenne, dans les Hauts-de-Seine. Nous allons bien évidemment célébrer cela avec nos clients à partir du 19 août et jusqu’au 15 septembre avec des animations dans tous nos points de vente et des offres spéciales à la mesure de l’évènement. Fin octobre un grand dîner sera organisé à Nice avec plusieurs chefs.

Soulignons aussi que tout ce qui est local, origine France, va prendre une ampleur très significative durant cette relance, durant notre période anniversaire, et durant les mois à venir, et ce, dans nos 98 halles à travers le pays. Nous testons d’ailleurs à Chambéry et à Chartres, un espace « Carreau des Producteurs », permettant à des producteurs locaux de vendre en direct à nos clients, avant de, sans doute, l’étendre au réseau.

Comment se déroule votre accompagnement en matière de digitalisation ?

Nous avons beaucoup travaillé sur ce sujet en 2020, en 2021, et nous allons continuer à accompagner nos clients dans leur digitalisation. C’est très important, car 80 % des consommateurs recherchent un restaurant sur Internet et 1 Français sur 2 réserve en ligne. En 2020, nous avions 35 000 clients qui avaient adopté notre solution Dish, nous en aurons 41 000 en 2021 et nous visons les 52 000 en 2022. Dish permet en plus de la création d’un site internet, faisant notamment remonter l’établissement dans les moteurs de recherches, d’avoir un outil de réservation en ligne, de gestion du click & collect, de la livraison et du paiement en ligne. Par ailleurs, notre partenariat livraison avec Stuart va être opérationnel à partir de cet été.

Quels sont vos enjeux des douze prochains mois ?

Metro devra poursuivre son développement, être pertinent et avoir un très haut niveau de service sur la livraison. Notre deuxième enjeu est de continuer à accompagner nos clients sur tout ce qui concerne la RSE, afin que la restauration soit exemplaire en la matière vis-à-vis de ses clients mais aussi des équipes qui y travaillent. Ensuite, Metro va s’associer aux enjeux de la restauration que le président de la République a rappelé lors de son déplacement à Valence : le local et le terroir, la digitalisation, l’emploi et la formation.

Votre présence sur le Sirha, fin septembre, sera-t-elle aussi importante que d’habitude ?

Nous y serons bien présents et ce, dans trois endroits. Nous aurons une surface un peu plus réduite que d’habitude dans le Hall  1, où nous ferons la part belle aux produits frais, au développement durable, à l’équipement ainsi qu’aux services, notamment digitaux, mais aussi aux producteurs avec lesquels nous travaillons avec un marché des producteurs.

Pour mettre en avant notre modèle omnicanal et notre activité livraison, nous aurons également un stand dans le Hall 3, là où se trouvent les acteurs de la livraison foodservice. Et puis, bien sûr, nous serons présents dans le Hall  6, c’est-à-dire dans le Village des chefs du Bocuse d’or, pour accueillir nos clients et partager avec eux cette compétition passionnante dont nous sommes toujours main sponsor.

Propos recueillis par Jean-Charles Schamberger
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