Dark kitchen, plus qu’une tendance, une révolution !
Les dark kitchens sont sorties de l’ombre. Depuis quelques mois, on entend de plus en plus parler d’elles. Ce mouvement n’est plus frémissant, ni même brulant, mais chaud bouillant.
Les dark kitchens sont à la restauration, ce que le fast-food a été dans les années 70. Analyse d’un mouvement qui révolutionne la restauration.
Un phénomène en pleine expansion
Selon Food Service Vision, le marché de la livraison de repas à domicile est estimé à 3,3 Md€ en 2019, soit environ 5 % de la restauration commerciale. En 2022, il pourrait atteindre 7 Md€. Selon Euromonitor, le marché des dark kitchens pèsera 1 000 Md$ en 2030. Il en existe plus de 7 500 en Chine, 3 500 en Inde… Et chez nous ? Chez nous, le phénomène est récent, il est apparu il y a quelques années « et il progresse de 25 % par an », explique Adrien de Schompré, fondateur de Smart Kitchen.
et qui lèvent des millions
Des précurseurs comme Jean Valfort, groupe Panorama, Antoine Soulier, qui quitte Deliveroo pour créer Taster en 2017, ou le même Deliveroo qui créé son concept Editions en 2018. Cette même année, Jean Valfort créé Dark Kitchen (Kitchen Club). Les deux entrepreneurs lèvent alors des millions pour développer leur business. Mais c’est vraiment en 2020 que le phénomène explose. Fermés pour cause de crise sanitaire, les restaurants n’ont pour seule perspective afin de subsister de faire de la livraison (et de la vente à emporter et du click & collect). Avant la crise, il y avait 500 dark kitchens en France, elles sont au bas mot 1 500 aujourd’hui. Et Not So Dark, créée en 2020, vient de lever 20 M€.
Mais c’est quoi une dark kitchen ?
Dark kitchen, ghost kitchen, cuisine fantôme, le terme désigne un restaurant sans salle, dont la cuisine est uniquement dédiée à la livraison ou la vente à emporter. « Une dark kitchen ce n’est pas si sombre, nous n’avons rien à cacher. Nos cuisines sont vraiment cleans et tout y est rationnalisé », explique Alexandre Haggai de Not So Dark. Si on y réfléchit bien, le phénomène n’est pas si nouveau. Pizza Hut ou Domino’s Pizza ont construit leur réussite sur ce modèle. D’une seule cuisine, partent plusieurs marques et beaucoup de marques. Celles-ci sont virtuelles et doivent pour exister se faire connaître du public par les réseaux sociaux afin de se démarquer.
Un nouveau modèle est en train d’émerger, des dark kitchens transparentes, ouvertes sur la rue. Elles ne se cachent pas et accueillent les clients pour de la vente à emporter. C’est le cas de Dumpling Queen ou de la toute nouvelle cuisine du groupe Eleni et du chef Juan Arbelaez,Street Lab.
Car il existe bien plusieurs modèles de dark kitchen :
- La dark kitchen "traditionnelle", des marques virtuelles créées pour n'exister qu'en livraison (Not So Dark, Smart Kitchen, Dark Kitchen du groupe Panorama, Aloha Burger, Mame Kitchen...). Cela ne les empêche pas de travailler avec des chefs et d'élaborer des recettes pointues, adaptées à la tendance du moment et surtout à la livraison ;
- La dark kitchen hybride, sorte de labo-atelier dépendant d'un ou plusieurs restaurants, c'est le modèle de Dumplin Queen, Flower Food, In My Belly... Elles peuvent être transparentes et ouvertes sur la rue pour accueillir le public pour de la vente à emporter ;
Les dark kitchens de chef. Leur carte n'est pas toujours adaptée à la livraison, alors ils créent une nouvelle marque dédiée et profite ainsi de leur notoriété et accèdent au marché de la livraison (modèle Editions de Deliveroo, Street Lab du groupe Eleni et Juan Arbaelaez , Taco Mesa de Beatriz Gonzalez...)
Une cuisine, plusieurs marques
L’intérêt de la dark est… multiple. En effet, la dark kitchen a de nombreux atouts par rapport à un restaurant traditionnel. « Une marque peut exister sans présence physique », explique Adrien de Schompré de Smart Kitchen. Les équipements sont très différents. Les dark kitchens peuvent tester les recettes, les cartes, voir ce qui marche le mieux auprès des clients. Un restaurant de sushi peut très vite s’adapter à la tendance des pokés, ou une cheffe comme Hélène Darroze mettre en place sa carte de burgers ou Michel Sarran, sa carte de croque-monsieur. « avant », un changement pareil remettait en cause tout le concept du restaurant installé. Ainsi une dark kitchen gère plusieurs marques, 5 à 8 chez Editions de Deliveroo à plus de 20 chez Not So Dark.
Quelle législation ?
- C’est la même réglementation que pour un restaurant. Respect des règles d’hygiène et de sécurité, licence obligatoire pour la vente d’alcool et déclaration au préalable.
- Un investissement réduit
- Pas de fonds de commerce, pas besoin d’investir dans un lieu de passage ;
- Surface réduite, puisqu’une seule cuisine gère plusieurs marques ;
- Pas besoin de décoration ;
- Frais de personnel réduit.
Un phénomène parisien ?
« Pas du tout ! 3/5e du marché est en Province. En fait, partout où se trouve les plateformes de livraison. Le marché va surprendre. On n’a rien vu encore ! » conclut Jean Valfort.
Myriam Darmoni